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Pour une école de la culture, contre l'inquisition pédagogiste - un blog de Michel Renard
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  • défense de l'école des savoirs et de la culture, pour que l'école instruise vraiment les enfants des milieux populaires non favorisés culturellement, contre les destructeurs de l'école (libéraux, pédagogistes, démagogues...)
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19 mai 2006

Vraie affaire d'État : l’acceptation de la régression de l’École (Ivan Rioufol)

stop_ignorance
l'école produit des générations d’étudiants bien gentils et très ignorants
(Laurent Lafforgue)





Vraie affaire d'État :

l’acceptation de la régression de l’École

Ivan RIOUFOL


L’affaire d’État, elle est à rechercher dans l’acceptation de la régression de l’Ecole. Mais les «investigateurs» 2350130509.08.lzzzzzzz2ne s’intéressent pas à ce désastre, que dénonce Jean-Paul Brighelli, professeur de lettres (À bonne école, éditions Jean-Claude Gawsewitch). Pour avoir décrit la vérité, il a été évincé, un temps la semaine dernière, du jury du Capes de lettres modernes. Une décision sur laquelle les autorités sont vite revenues, face à la montée des protestations.


Cette victoire contre un délit d’opinion corrige l’injustice que fut la démission, du Haut Conseil de l’Education, du mathématicien Laurent Lafforgue. Il s’était opposé à lalaurent_lafforgue consultation d’experts de l’Education : «Pour moi, c’est exactement comme si nous étions un "Haut Conseil des droits de l’homme" et que nous envisagions de faire appel aux Khmers rouges pour constituer un groupe d’experts pour la promotion des droits humains.» Propos fatal.

Or ce sont ces témoins indignés, qui ne se revendiquent d’aucun parti, qu’il faut écouter. Lafforgue, encore : «Je crains que l’école que nous avons aujourd’hui, après tant de politiques prétendument émancipatrices, ne soit presque plus une école de la liberté. Elle produit des générations d’étudiants bien gentils et très ignorants, aussi incapables d’écrire un livre que de fonder une entreprise ou de faire une révolution.»

Ce constat d’un «constant vide prétentieux des programmes et leur déstructuration systématique», Brighelli le dresse donc, après d’autres, en appelant «de toute urgence à en finir avec l’instinct de survie sectaire des pédagogues». Ceux-là méprisent l’orthographe, la culture classique, les tables de multiplications, au profit de l’éducation citoyenne, la tyrannie du ludique, les lycées «lieux de vie». Le naufrage démocratique, observable dans l’affaire Clearstream, commence par cette indifférence devant la perte du savoir. N’est-il pas là, le scandale ?


«Da Vinci Code»
Le totalitarisme est proche quand le discours unique remplace le raisonnement. Umberto Eco (Cinq2253943312.08.lzzzzzzz questions de morale, Grasset, 1997) : «Tous les textes scolaires nazis ou fascistes se fondaient sur un lexique pauvre et une syntaxe élémentaire, afin de limiter les instruments de raisonnement complexe et critique.» L’Education nationale en est là, avec ses dictées de cinq lignes au brevet, sa grammaire rudimentaire, ses cours de morale altermondialiste.

C’est parce que les ignorances sont manipulables que les extravagances du Da Vinci Code, ce livre à succès qui remet en cause les fondements de la religion chrétienne, peuvent être dangereuses. Nombreux sont ceux qui sont prêts à gober que Jésus s’est marié avec Marie-Madeleine, que leur descendance s’est établie en France et que l’Opus Dei est une secte protégeant ces secrets !

Ivan Rioufol
Le Figaro, 19 mai 2006

- source de cet article : Le Figarobody1258jyqsjnpgwswbrtt











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19 mai 2006

La fin de l'école républicaine ? (Philippe Mallard)

philippe_mallard_prof_hg
Philippe Mallard, professeur d'Histoire


La fin de l'école républicaine ?

Philippe MALLARD


Une analyse de Philippe Mallard (2001), professeur d'Histoire à Bergerac (Dordogne), sur le site du Comité laïcité-République de la Vallée de la Dordogne. Excellent "démontage" de la connivence entre les théories pédagogiques et les objectifs patronaux et "européens" de marchandisation des services publics scolaires, d'adaptabilité des individus aux stratégies économiques néo-libérales.


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Bille en tête, peinture de Grégoire Debailly (source)


Extrait :

La fin des savoirs

L’Ecole n’a plus à transmettre des contenus, des savoirs - seuls garants d’émancipation - mais des compétences utilitaristes. Les réformes engagées en Europe (France, Belgique…) vont dans le même sens d’une atomisation de l’enseignement, avec un abandon de savoirs de haut-niveau au profit de multiples compétences garantissant “l’adaptabilité”, la “flexibilité” du futur employé.

C’est ainsi que le ministre Claude Allègre, comme ses confrères et consoeurs européens, déclarent les programmes “surchargés” de connaissances, qu’on évoque l’empilement des savoirs signe d’un archaïsme de l’institution. On assiste alors à la collusion de deux mondes qui vont se rapprocher pour l’occasion : l’idéologie néo-libérale et certaines doctrines pédagogiques “de gauche”. Ces doctrines font - consciemment ou non - le jeu des partisans de la libéralisation du Service Public d’Education.

La récupération du discours pédagogique anti-élitiste (l’élève au centre du système, diminution d’horaires disciplinaires au profit d’activités pluridisciplinaires à l’évaluation hasardeuse - TPE, ECJS), et sonlogo1 détournement permet de mettre de côté la mission d’instruction et, cela, au nom d’une certaine “conception de l’éducabilité” : on met en avant les compétences (savoir-faire) et la “citoyenneté” (savoir-être) seules garants de “l’employabilité”. C’est donc bien au nom de la volonté patronale (camouflée derrière l’idée de pratiques pédagogiques recentrées sur l’élève afin de lutter contre “l’échec scolaire”) que les objectifs cognitifs sont relégués à l’arrière-plan. Ainsi les enseignants sont invités à inculquer les compétences réclamées par les entreprises : moins de connaissances générales, de culture et plus de compétences “adaptatives”.

Le contenu des matières est donc perçu comme secondaire par rapport aux compétences “transversales”. Et c’est ainsi que l’ECJS ou les TPE supplantent les contenus disciplinaires. Ces heures précieuses dévolues à l’acquisition de compétences transversales flexibles et rapidement exploitables sont prises sur des enseignements “inutiles” car non productifs : Histoire-Géographie, Science et Vie de la Terre, Philosophie, …



L’éducation du futur travailleur par le “ savoir-être ”

Le second rôle que l’entreprise attribue à l’Ecole, c’est l’acquisition de comportements sociaux “conformes”. Ces “compétences sociales” (ou “savoir-être” dans le langage pédagogique) doivent permettre de socialiser le futur travailleur. Les “capacités citoyennes” (dialogue, gestion des conflits, communication, flexibilité, sens social, disponibilité...) doivent ainsi assurer l’employabilité de l’élève... et sa soumission.

Le philosophe J.-P. Le Goff, dans son ouvrage La Barbarie Douce a bien montré comment les 9782707130327fsméthodes de management des entreprises privées étaient reprises par les politiques éducatives.

C’est ainsi que le ministre de l'Éducation nationale et celui de l’Emploi ont mis au point une méthode de “gestion prévisionnelle des compétences”. Par ex. en ce qui concerne l’emploi de magasinier, toute une série de compétences permettent de cibler l’activité. À la rubrique “manière d’être” dans la partie “Réception/Stockage”, les compétences attendues sont :

- être patient pour tolérer l’aspect routinier des manipulations et l’attitude des clients.
- être minutieux pour éviter la casse…

L’activité est atomisée en plusieurs dizaines de compétences et devient ainsi une “machinerie fonctionnelle”. Ces théories de management libérales propres aux entreprises privées sont réinvesties dans le champ éducatif facilitant ainsi l’adéquation école/entreprise.

Par exemple, en Cycle I de l’Ecole primaire le livret d’évaluation ne comprend pas moins de 89 compétences. Ces grilles produites par des spécialistes des Sciences de l’Education sont surtout des compétences opérationnelles. Toutes ces compétences doivent être utiles, efficaces. L’enseignement devient ainsi mécanique, la finalité de l’Ecole devient adaptative.

Philippe MALLARD
professeur d'Histoire

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Les horreurs de la pédagogie : savoir-être et machinerie fonctionnelle


* site personnel de Philippe et Nathalie Mallard : Thucydide

* Grégoire Debailly

- retour à l'accueil

19 mai 2006

École : le pavé dans la mare de Sarkozy

24353
dans une même ville, un établissement pourra
être spécialisé dans les matières littéraires, un autre dans
le sport, un troisième dans les mathématiques... (!!!)



École : le pavé dans la mare de Sarkozy

Le ministre se prononce pour une
"différenciation" des revenus des enseignants et veut supprimer
à terme la carte scolaire


02_012


Après Ségolène Royal, Nicolas Sarkozy : une nouvelle attaque

contre l'école de la culture par un effarant libéralisme,
dont les conséquences remettraient en cause le principe même
d'instruction scolaire égale pour tous

       


Les "rémunérations (des enseignants) doivent être différenciées", a estimé dans un entretien au Figaro le ministre de l'Intérieur et président de l'UMP Nicolas Sarkozy, dont le parti organise ce mercredi une "Convention Education" à Paris.
"Il faut revaloriser leur métier d'enseignant, qui est essentiel et difficile. Les rémunérations doivent être différenciées. Celui qui fait le plus d'heures, qui va au contact des élèves les plus difficiles doit être mieux payé. Et les enseignants qui veulent travailler plus doivent pouvoir le faire", a déclaré Nicolas Sarkozy.
Il a assuré qu'il fallait "plus de liberté pour les enseignants. On n'enseigne pas la lecture et l'orthographe de la même manière à tous les enfants. La clef c'est l'adaptation. L'enseignant qui a eu le temps en vingt ans de mettre au point ses propres techniques doit être jugé sur ses résultats et non sur ses méthodes".


"Mi-temps sportif"
Nicolas Sarkozy s'est également prononcé en faveur "de la suppression à terme" de la carte scolaire. "Je suis pour la suppression à terme de la carte scolaire. A terme, parce qu'elle n'est possible que dans le cadre d'une autonomie renforcée des établissements", a déclaré le ministre de l'Intérieur et président de l'UMP.
"Le social, selon Nicolas Sarkozy, n'est pas l'apanage des établissements publics. Les établissements privés ont une longue pratique et des réponses originales en la matière. L'enseignement privé déborde d'ailleurs de demandes d'inscriptions. Je n'accepte pas que la liberté de choix de l'école soit réservée à ceux qui habitent dans les beaux quartiers".
"Je crois au libre choix" a-t-il insisté, précisant que "dans une même ville, un établissement pourra être spécialisé dans les matières littéraires, un autre dans le sport, un troisième dans les mathématiques. La liberté de choix, c'est aussi la possibilité pour tout enfant qui le souhaite de faire un mi-temps sportif".

Handicapés
Il souhaite aussi "que les 50% d'enfants handicapés actuellement non scolarisés dans le milieu ordinaire, contrairement à ce que prévoit la loi, le soient. C'est fondamental pour l'esprit de tolérance et d'ouverture aux autres que l'école doit développer chez tous les enfants".
Le ministre de l'Education nationale, Gilles de Robien, ouvrira mercredi matin les travaux d'une "Convention Education" organisée par l'UMP, qui sera clôturée par Nicolas Sarkozy.

- source de cet article : Nouvel Obs.com, 22 février 2006.
- texte de l'interview de Sarkozy dans Le Figaro

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la carte scolaire dans la commune de La Garenne-Colombes


17 mai 2006

Le conservatisme est l'essence même de l'éducation ("Vandale")


ecole1
à Rome



Le conservatisme

est l'essence même de l'éducation

"Vandale"


Entièrement d'accord avec cette analyse
que je défends moi-même depuis longtemps.
J'aurais seulement parlé d'
instruction et non d'éducation
(Michel Renard)



On me dit que la mission fondamentale de l'enseignant a changé, qu'il faut désormais un peu plus éduquer et et un peu moins instruire. Transmettre des savoirs, c'est devenu ringard, voire obscène : il faut socialiser, faire acquérir des compétences, communiquer, apprende à apprendre. L'Ecole conçue comme lieu de vie ... avec comme parrains Allègre-Meirieu et la FCPE.

J'avoue être perplexe. Faut-il au nom de la modernité introduire à l'école l'enseignement de la vie de tous les jours ? la pilule, internet, comment trouver un job d'été, le CAC 40 et la Tchéchénie, tout ce qu'on trouve dans les journaux ou au café du commerce ? Faut-il laisser la rumeur du monde envahir la classe, lors même qu'elle est déjà trop présente et qu'elle nuit à la concentration des élèves  ? Faut-il au nom de la modernité adapter l'école à son environnement immédiat ? On voit déjà dans certains manuels de français de collège des exercices consistant à analyser une étiquette de bouteille de Coca-cola. Ailleurs on lit Stephen King ou on débat sans arguments sur le racisme. Au brevet des collèges, on doit rédiger une argumentation sur le thème "Persuadez votre mère d'acquérir un téléphone portable" (sujet 1999). On troque ainsi sans trop réfléchir une instruction reposant sur des fondements solides, une instruction capable d'accompagner chacun toute sa vie, une instruction donnant à réfléchir et structurant la pensée, pour des paillettes, de l'immédiat, de l'éphémère dont il ne restera rien, absolument rien, dans la tête du gamin une fois que la cloche aura retenti. À ce compte, arrêtons de recruter des professeurs à l'université et substituons aux cours en classe les débats de Delarue à la télé : ça coûtera moins cher au contribuable et puis, au moins, en regardant Delarue, on peut manger sans se fatiguer les neurones.

Le plus frappant, c'est que cette réforme, qu'on nous présente comme le comble de la modernité, a déjà été 2070325032.08.lzzzzzzz2expérimentée et analysée sous d'autres cieux, il y a près d'un demi-siècle. Hannah Arendt décrit très bien dans La crise de l'éducation l'évolution qu'a connue le système américain dans la période récente, au cours de laquelle on a remplacé la transmission des savoirs par l'acquisition de "compétences". Le remplacement de l'instruction par l'éducation, avec une grosse louchée de pédagogisme, les Etats-Unis le pratiquent depuis plus de 40 ans maintenant : ça donne des élèves sans doute très épanouis, et d'une dextérité étonnante pour manier la télécommande et le joystick. Mais aussi des individus illettrés, dont la seule fenêtre sur le monde est la banalité hertzienne quotidienne, des individus qui sont la proie facile des publicitaires et des politiques, des individus qui ne contesteront jamais le monde dans lequel ils sont, des individus qui n'auront jamais aucun sens critique. De parfaits consommateurs repliés sur leur tribu.

Cette défaite de la culture, Arendt l'explique par le fait qu'on s'est trompé sur la mission fondamentale de l'Ecole: "En pratique, il faudrait bien comprendre que le rôle de l'école est d'apprendre aux enfants ce qu'est le monde, et non pas leur inculquer un art de vivre. Etant donné que le monde est vieux, toujours plus vieux qu'eux (les enfants), le fait d'apprendre est inévitablement tourné vers le passé, sans tenir compte de la proportion de notre vie qui sera consacrée au présent."

Et quelques lignes auparavant  : "il me semble que le conservatisme, pris au sens de conservation, est l'essence même de l'éducation, qui a toujours pour tâche d'entourer et de protéger quelque chose - l'enfant contre le monde, le monde contre l'enfant, l'ancien contre le nouveau. "

vieq1La mission fondamentale de l'Ecole est de transmettre ce que les anciennes générations ont découvert, ce qu'elles ont pensé, la façon dont elles ont vécu. C'est la nature intrinsèque de l'Ecole que d'être tournée vers le passé et d'enseigner des choses vieilles, toujours plus vieilles que les enfants à qui elles s'adressent. L'objectif est de transmettre le témoin aux génération suivantes, en veillant à ce que le témoin ne tombe pas à terre, en veillant à ne pas rompre la chaîne de transmission qui lie le passé à l'avenir.

Deux principes en découlent. L'Ecole ne peut pas être sous l'emprise continue des réformes, comme c'est le cas depuis 25 ans (une réforme tous les 2 ans en moyenne) : elle a besoin de stabilité. D'autre part, toutes les réformes de l'Ecole qui visent à mettre l'Ecole en phase avec la société au détriment de l'acquisition de connaissances sont destructrices de ce qui constitue l'essence même de l'Ecole.

L'Ecole est par essence ringarde. Elle doit même revendiquer et afficher sa ringardise.

"Vandale"


- source de cet article

17 mai 2006

Combien d'élèves entraient-ils en 6e en 1962 ? (Michel Delord)

21568_tn
1962-63 : classe de 6e du collège Jean Rostand
à La Rochefoucault en Charente


Combien d'élèves

entraient-ils en 6e en 1962 ?

le mensonge des théoriciens
d'une réforme à la baisse des programmes au nom
d'une massification des effectifs

Michel DELORD
professeur de Mathématiques




Seuls 10% allaient au lycée...
Dans la série des arguments fallacieux des théoriciens du niveau qui monte, figure en bonne place cette affirmation : "Vous comparez ce qui n'est pas comparable, seul 10% d'une classe d'âge allait au lycée". Réponses :

1°) Les comparaisons tirées de l'étude sur le passage du CEP comparent ce qui est comparable puisque le CM2 n'a pas été massifié.

2°) Dans ce texte je montrais que, alors que depuis de nombreuses années, on savait que à peu prés la moitié d'une classe d'âge avait le Certificat d'Etudes, les tenants du niveau qui monte sous-entendaient ou affirmaient clairement que c'était une minorité de l'ordre de 10 ou 20%. Le raisonnement est strictement sur le même sur le passage en sixième, confondue avec le passage en lycée pour le début des années 60, époque à laquelle on peut faire une référence comparative puisque les programmes de Cours Complémentaire et de premier cycle des lycées étaient forts semblables et de toute façon d'un niveau supérieur à ce qui est exigé maintenant.

3° ) Il y avait plus de 10% ...
En effet, nous disposions de toute l'information nécessaire depuis l'enquête de 1963 de la revue Populations. Cette enquête est loin d'être inconnue notamment de chercheurs comme Baudelot et Establet puisqu'elle est citée à la page 370 du tome IV de l'Histoire générale de l'enseignement et de l'Education en France, publié sous la direction de L'Institut National de Recherche Pédagogique, l'auteur en étant Antoine Prost.

Le tableau de la page 370 donne :

Entrée en sixième ( 1962) :
Sixième de lycée 27 %
Sixième de CEG 28 %
Non entrés en sixième 45%

Donc, en 1962, ce n'était pas 10% mais 55% qui passaient en sixième...

Michel Delord
5 octobre 2003

- source de cet article

- iconographie : photo de classe

- retour à l'accueil

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17 mai 2006

Une nouvelle ennemie de l'école de la culture : Ségolène Royal

21222_tn
Ségolène Royal,
un regard de travers sur l'école



Une nouvelle ennemie

de l'école de la culture :

la candidate socialiste Ségolène Royal

«les enseignants ne peuvent plus
se contenter de transmettre des savoirs :
il leur incombe aussi un rôle d'animateur»
(Ségolène Royal)


Bravo Ségolène Royal...!! plus à droite que les plus libéraux en Europe...!!
en matière d'école, les enfants issus des couches populaires sont désormais "lâchés" par les principales forces politiques du pays.

«Il faut passer un pacte avec les organisations syndicales d'enseignants, qui porterait en particulier sur le changement de méthode de travail. Face au scepticisme des Français sur le concept d'égalité des chances [...], notre système scolaire [...] doit apprendre à faire autant que possible du "sur mesure".

Il faut aussi faire entrer les parents à l'école.

Une évolution du rôle et du métier des enseignants est nécessaire. Ceux-ci ne peuvent plus se contenter de transmettre du ou des savoirs : il leur incombe aussi un rôle d'animateur, de dialogue avec les enfants et les parents.

[...] L'extension de la durée hebdomadaire de présence des enseignants dans les établissements scolaires [...] serait une des contreparties d'une plus grande liberté pédagogique. [...]

L'emploi du temps des élèves et les rythmes scolaires doivent être totalement revus : la séquence d'une heure de cours ne semble plus vraiment adaptée»
(commission nationale du projet, le 18 janvier 2006).

À l'école comme ailleurs, le «royalisme» rime avec pragmatisme. Mais Ségolène Royal ne craint pas de lever un tabou : le temps de travail des enseignants. En prônant «un pacte» avec les syndicats, elle s'attaque à une montagne que ni Lionel Jospin (en 1989), ni Claude Allègre (en 1997) n'ont réussi à gravir.

cité par Libération, 7 février 2006

- source de cet article : Libération du mardi 7 février 2006




6


il faut construire un grand mouvement d'opinion pour la défense de l'école des savoirs et de la culture, pour que l'école instruise vraiment les enfants des milieux populaires non favorisés culturellement, un mouvement qui pèserait au moment des présidentielles, contre les destructeurs de l'école
(libéraux, pédagogistes, démagogues...)


dscf0795
lycée français de Koweït




L'instruction, base de la liberté

10 septembre 1791 - Talleyrand


«Les hommes sont déclarés libres ; mais ne sait-on pas que l'instruction agrandit sans cesse la sphère de la liberté civile, et, seule, peut maintenir la liberté politique contre toutes les espèces de despotisme ? Ne sait-on pas que, même sous la Constitution la plus libre, l'homme ignorant est à la merci du charlatan, et beaucoup trop dépendant de l'homme instruit. (...) Celui qui ne sait ni lire ni compter dépend de tout ce qui l'environne ; celui qui connaît les premiers éléments du calcul ne dépendrait pas du génie de Newton, et pourrait même profiter de ses découvertes».

Talleyrand (1754-1838), évêque d'Autun en Bourgogne en 1788,
député du clergé aux États Généraux en 1789

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- retour à l'accueil

17 mai 2006

C'est la "vieille école" qui a effectué la démocratisation (Michel Delord)

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une école dans les années 1960



C'est la "vieille école"

qui a effectué la démocratisation

sans baisse des exigences ni des connaissances

Michel DELORD



M. Sylvain Grandserre a écrit :

"Certains préfèrent les inventer, d'autres répéter ce qui a été fait et qui marchait si bien.... avec ceux qui y arrivaient !!! Comment peut-on avoir déjà oublié qu'au début des années 60, moins d'un jeune sur deux entrait au collège !"

M. S. Granserre, dites-moi si je me trompe mais vous semblez vouloir dire, sans le dire ce qui te permettra ensuite de dire que vous ne vouliez pas le dire , que l'école et les méthodes employées dans cette école étaient élitistes puisque elles ne permettaient , au début des années 60 qu" à moins d'un jeune sur deux d'entrer au collège".

Reprenons ( je peux donner les sources exactes ) :

"Au début des années 60, moins d'un jeune sur 2 entrait au collège".

On a heureusement les chiffres :
- pour l'année scolaire 60/61 : 46,4%
- pour l'année scolaire 61/62 : 47%
- pour l'année scolaire 62/63 : 55%

Donc, si il y a moins de 50% jusqu'en 1962, le cap des 50% est passé en 1962 sans baisse d'exigence des programmes.

Mais poursuivons, en 1969/70, donc avec des élèves qui ont commencé leur scolarité et leur CP en 1964 à l'époque ou 80% des élèves sortaient du CP en sachant lire et en connaissant les 4 opérations), ceux qui ont suivi les programmes et méthodes recommandées et en gros stables depuis 1880, le taux de scolarisation varie de 75% à 90% selon les départements.

Donc, on peut dire que c'est la "vieille école" et ses vielles méthodes qui ont effectué depuis les années 1900 où le passage en sixième était de l'ordre de moins de 10% (20 % en 1945) TOUTE la démocratisation de l'enseignement si ce mot a un sens, c'est-à-dire faire accéder à un niveau supérieur de connaissances une part croissante de la population, sans baisse des exigences ni des connaissances requises pour passer en sixième.
Ensuite, mais ces réformes sont préparées bien avant 68 sous l'influence des technocrates du régime, et notamment sous l'influence du mouvement Freinet (voir par exemple la part importante de ce mouvement dans la commission Rouchette), on assiste peut-être à une augmentation du taux de passages en sixième des élèves mais sur la base de deux facteurs qui n'existent pas auparavant :

a) la baisse des exigences :

1) en mathématiques avec les mathématiques modernes dont Prost, un des deux leaders principaux despr2262020957.08.lzzzzzzz reformes avec Louis Legrand, explique qu'il s'agit d'un allègement des programmes, mais que M. Prost trouve insuffisant (il doit être satisfait des programmes actuels) (Prost, Histoire de l'enseignement, T IV, p 174).

2) en français avec les conséquences de la commission Rouchette dont un des membres, Louis Legrand, explique qu'un des buts de la commission était "des propositions d'allégements sur le programme de grammaire qui, pratiquement, se voyait amputé du programme du CM2." (in Pour une politique démocratique de l'éducation, Louis Legrand, PUF ,1977. Chap. VIII - L'innovation sur les contenus et les méthodes : l'exemple du français à l'école élémentaire) [Louis Legrand persiste dans ses visées liquidatrices d'une école transmettant les savoirs : interview 1999 - MR].

cros4b) l'influence des gestionnaires qui sont affolés par "L'explosion scolaire" (titre du best seller de Louis Cros au début des années 60) dont ils pensent qu'elle va coûter très cher à cause du "baby boom" et de l'allongement de la scolarité. La solution est pour eux simple : s'il y a plus de liquide à faire passer dans un tuyau scolaire allongé, réduire les coûts signifie accélérer la circulation du liquide en supprimant les redoublements. Et ils sauront s'appuyer, pour réaliser cette volonté draconienne d'économie, sur divers mouvements pédagogiques qui leur apporteront la vaseline théorique pour faire passer leurs réformes.

Je n'insisterais pas non plus sur le fait que les expérimentations faites à l'époque montreront toutes que les "nouvelles pédagogies " non seulement aboutissent à une baisse de niveau mais de plus défavorisent les enfants des classes déjà défavorisées (si M. S. Grandserre veut des preuves et plus précisément des preuves données non par mon camp mais par les partisans des "nouvelles pédagogies", je peux les lui donner).
Vous avez une remarque , M. S. Grandserre ?

Michel Delord
20 novembre 2005

 

- 3 textes complètent ce sujet :

1) Note technique sur la massification, septembre 2004

2) Seuls 10% allaient au lycée, octobre 2003

3) Note à propos du texte de Gramsci sur la grammaire, décembre 2005

delordMichel Delord
Vice-président du GRIP
CA de la Société Mathématique de France
Board of advisors, Nonpartisan Education Review

 



- source de cet article : le forum de "Lire et écrire"

 

- retour à l'accueil

17 mai 2006

Royaume d'Ubu : Jean-Paul Brighelli viré puis réintégré... en 48 h

ubu_roi_affiche



Royaume d'Ubu :

Jean-Paul Brighelli viré, puis réintégré

en 48 heures...!



Je n'ai même pas eu le temps de lui adresser un message de soutien... Jean-Paul Brighelli a été "débarqué", le 10 mai, du jury de Capes de Lettres par le président de celui-ci : Alain Pagès. Le 12 mai, l'Inspection générale lui expliquait qu'il s'agisssait d'un malentendu : il était réintégré. Et ce M. Pagès, thuriféraire dualain_pag_s_11 pégagogisme dévastateur, sera-t-il blâmé pour ses tendances inquisitoriales ? Ne pourrait-on désigner un réel défenseur de la littérature à la présidence du jury de Capes de Lettres ...? (Michel Renard, 12 mai)

                                                                                                            Alain Pagès

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sur le blog de Jean-Paul Brighelli

10 mai 2006

Règlements de comptes

Je viens, aujourd'hui 10 mai, de me faire débarquer du CAPES de Lettres Modernes - pour délit d'opinion.
Le président du jury, Alain Pagès, flanqué du vice-président, l'Inspecteur Général Jean Jordy, m'a interrompu au milieu du classement des copies que nous venions de ramener à Tours, centre de concours. Il y avait apparemment urgence... Il m'a expliqué que depuis septembre dernier, juste après la parution de la Fabrique du crétin, plusieurs membres du jury, particulièrement ceux de l'épreuve de didactique (dite pudiquement "épreuve sur dossier") avaient exprimé leur difficulté à siéger désormais dans un concours qui m'hébergeait. Une pétition a commencé à circuler entre ces honorables enseignants, pour la plupart IPR ou chargés de cours en IUFM. Le mouvement s'est accentué après la parution de À bonne école, où j'ai le malheur d'interroger le bien-fondé de la part de plus en plus grande de la didactique dans les concours de recrutement - cette avancée sournoise de la pensée unique pédagogiste. Désormais, m'a-t-on expliqué, je ne pouvais plus être présent à l'oral - ni à l'écrit, alors même qu'après enquête (!), je donnais toute satisfaction à ce niveau, cette année comme l'année dernière.

Mon cas personnel est peu de chose. Mais il faut être attentif à un point : je suis viré pour délit d'opinion - et c'est tout. Cette fois, c'est moi. La prochaine fois, tel autre membre qui aura eu la naïveté de mettre en avant les savoirs fondamentaux dans la matière que l'on est censé enseigner, et non l'art délicat de l'enseigner conformément à la Vulgate des IUFM, fera les frais de la hargne de ses colistiers. Quand les universitaires ou les profs de prépas seront priés de rester eux-aussi au vestiaire, le ménage sera fait. Et les néo-certifiés seront calibrés au plus juste des ambitions de la sacro-sainte pédagogie...

Bonne chance à tous les résistants du moment. Je ne perds pas courage. Ce n'est qu'un début...

Jean-Paul Brighelli


12 mai 2006

Reddition en rase campagnelogo_men

Chers tous, l'Inspection générale vient de me téléphoner — longuement. "Tout cela n'était qu'un malentendu, apaisons les esprits." Le président du jury a suivi, par mail : réintégration immédiate.
Ceux qui voulaient ma peau et avaient pétitionné pour mon éviction doivent manger leur chapeau.

C'était une manière de me tester, et surtout de tester mes amis, la presse, et sans doute le ministre, dont les services ont réagi avec une célérité inattendue, en disant le droit — sans commentaires.

Mille mercis à toutes celles et tous ceux qui m'ont soutenu, sur ce blog et ailleurs. Et nous le savons désormais, si nous l'avions oublié : en cas d'attaque, seule une riposte massive peut décourager l'agresseur. Hasta la victoria siempre !

Jean-Paul Brighelli


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- La fabrique du crétin. La mort programmée de l'école, Jean-Paul Brighelli, éd. Jean-Claude Gawsewitch, 2005.

- À bonne école, Jean-Paul Brighelli, éd. Jean-Claude Gawsewitch, 2006.

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- forum de débat sur la Fabrique du crétin : e-litterature.net


16 mai 2006

Colère contre le syndicat des instituteurs (Michel Renard)

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Colère contre le syndicat des instituteurs

le syndicat des instituteurs

au secours des fourriers de l'illettrisme...!

Michel RENARD


rubon52Mesdames, messieurs les dirigeants du SNUipp-FSU (Syndicat National Unitaire des Instituteurs et Professeurs des Ecoles),

(je ne dis plus "chers collègues" car vous êtes passés dans le camp de ceux qui s'acharnent depuis plus de trente ans à détruire une école que, depuis également plus de trente ans, j'admire et je défends : l'école de la culture)

Ah...! Bravo votre pétition du 2 janvier sur la lecture... Quand je pense que j'ai voté pendant des années pour le SNES-FSU aux élections professionnelles... et que je vous vois aujourd'hui servir de bouclier à tous les fourriers de l'illettrisme, tous les Charmeux (!!), Meirieu, Goigoux et Cie, toute la camarilla pédagogiste des ICEM, IUFM, "Cahiers pédagogiques" et autres spécialistes en "sciences de l'éducation" qui sont tout sauf des sciences, je me demande ce qui vous reste d'attachement à l'école de la République et de la culture.

Votre bilan est désastreux. Je l'ai mesuré en 25 ans d'activité, du collège à l'université, en college_duparcSeine-Saint-Denis. Vos statistiques ("4% d'élèves ne savent pas déchiffrer à l'entrée en 6ème") sont dignes du Gosplan et du mensonge soviétique. Vous devriez avoir honte de camoufler la réalité avec un tel cynisme... Mais il y a longtemps que vous l'avez quittée cette réalité.

Vous défendez un misérable petit pouvoir (les programmes de 2002 à la rédaction desquels vous avez contribué), alors que c'est le savoir et la culture qu'il faut défendre contre les Diaforus de l'obscurantisme pédagogiste et contre les visées libérales qui veulent "marchandiser" une école au rabais formant des consommateurs passifs et non-critiques.

Bel aveu tout de même : "l'apprentissage de la lecture se poursuit au cours de l'école élémentaire et n'est pas achevé au début du collège"...!! À quoi donc ont servi ces 5 années d'école primaire si l'apprentissage, le simple "apprentissage"..., de la lecture n'y a pas été effectué...???
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Je remercie, une fois de plus, mes institutrices et instituteurs qui m'ont appris à lire, à écrire, à compter, qui, chaque jour, nous ont fait lire, fait faire des dictées, des rédactions, de la grammaire, de la conjugaison, de la récitation, qui m'ont donné l'amour de l'école, de l'effort, des humanités, et je vous assure de ma profonde détermination à contrecarrer vos trahisons de cet idéal républicain.

Michel Renard, professeur d'Histoire au lycée de Saint-Chamond (Loire)
fils d'instituteur et d'institutrice
et arrière arrière-petit-fils de Charles Robert, instituteur communal
à Rom dans les Deux-Sèvres en 1840.

12 janvier 2006

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- le texte de la pétition du syndicat des instituteurs pour le maintien du désastreux statu quo en matière d'apprentissage de la lecture

16 mai 2006

de Robien a déclaré la guerre...! Profs bivalents au collège

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Gilles de Robien ne sait pas compter... un professeur d'histoire-Géographie,
étant déjà bivalent, deviendrait... trivalent...!





archipmf382Revoilà la "primarisation" du Collège...! Très mauvais exemple brandi par le ministre : le cas de l'Histoire-Géographie. Il faut, en effet, de nombreuses années avant qu'un professeur n'acquière la culture nécessaire à l'enseignement des deux disciplines qui, de toute façon, ne sont jamais transmises avec la même compétence selon que le professeur est historien ou géographe de formation (je ne parle pas de l'instruction civique...). Il doit certainement en aller de même avec la physique-chimie, et avec les sciences de la vie et de la terre (biologie et géologie)... En tout cas, de Robien ne sait visiblement pas compter... puisque ces professeurs, qui sont déjà "bivalents", deviendraient alors trivalents si on leur ajoutait une discipline (par exemple, les Lettres pour les historiens-géographes)...!

Michel Renard (janvier 2006)





Les profs bivalents réservés au Collège


Gilles de Robien a exclu d'étendre l'enseignement de deux matières aux enseignants de lycées, revenant sur ses propres positions d'il y a deux jours
Gilles de Robien, ministre de l'Education nationale, souhaite que la bivalence (enseigner deux matières) ne soit réservée qu'aux enseignants du collège. "Je souhaiterais que la 'bivalence' se passe pour les professeurs de collège. Personne ne s'étonne qu'un professeur enseigne l'histoire et la géographie!" a précisé le ministre mardi 10 janvier, sur Canal plus. Il avait pourtant relancé voilà deux jours son souhait d'étendre cette mesure aux enseignants du lycée.
Il a par ailleurs rappelé que 16% des enseignants inscrits au Capes 2006 (le concours de recrutement des enseignants de collèges-lycées) avaient choisi de passer une "mention complémentaire", c'est-à-dire d'avoir une seconde matière qu'ils pourront enseigner.

L'élève sera moins surpris
En sortant du primaire "un enfant passe d'un seul professeur à huit ou neuf profs au collège". Avec la bivalence, "il aura au collège trois ou quatre professeurs, il sera moins surpris car il aura des profs moins nombreux", a dit le ministre.
Il s'agit aussi, selon Gilles de Robien, d'une "simplification pour les enseignants dans leurs affectations".

"Ils auront un choix de plus (dans leur nomination) et donc ce sera un confort de plus. Cela donne de la souplesse pour les effectifs", a-t-il ajouté.
Le principal syndicat des enseignants des collèges-lycées, le Snes-FSU, a jugé lundi "très négative" la bivalence des enseignants tandis que le SE-Unsa a dénoncé une mesure "gestionnaire d'économie".

Le NouvelObs.com, 10 janvier 2006

- source de cet article

16 mai 2006

Réponse à Pierre Madiot, rédacteur en chef des Cahiers pédagogiques (Michel Renard)

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Pour que Victor Hugo "parle" aux lycéens d'aujourd'hui,
encore aurait-il fallu ne pas sacrifier l'apprentissage
de la langue française et des humanités...!





Réponse à Pierre Madiot,

rédacteur en chef

des "Cahiers-pédagogiques"

Michel RENARD




Monsieurmadiot
Dans votre laborieuse tentative de défendre ce qui a échoué (la "pédagogie variée et différenciée")*, je ne retiens qu'une affirmation qui montre que vous avez renoncé à toute définition exigeante des finalités de l'école.
Vous écrivez :
- "un texte du XIXe siècle parle peu à des élèves de seconde et (...) cette difficulté augmente aussi vite que se creuse l'écart entre Alphonse Daudet et les nouvelles générations".

Quelle découverte...! Mais quelle est donc la mission de l'école sinon de travailler à réduire cet écart ? Il n'est pas surprenant qu'un texte du XIXe siècle "parle peu" à des élèves de Seconde... surtout, quand les horaires de l'enseignement du Français ont diminué de moitié en l'espace de trente ans.
Et que tout a été fait pour priver les élèves des méthodes intellectuelles (parmi lesquelles la mémorisation, l'apprentissage explicite de la grammaire, de la conjugaison et de l'orthographe...) et des références culturelles permettant d'accéder aux "humanités".
Le rôle d'une école de la culture, qui s'oppose aux capitulations programmées par "l'école de la pédagogie", est précisément de parvenir à ce que les textes du XIXe siècle "parlent" aux élèves du collège et du lycée. Si vous refusez cet horizon culturel, continuez à faire de la pédagogie si cela vous chante, mais veillez à en préserver l'école...!

Michel Renard, professeur d'Histoire
au lycée de Saint-Chamond (Loire),
après avoir enseigné pendant 25 ans en Seine-Saint-Denis
et combattu tout aussi longtemps les horreurs du pédagogisme



* texte de Pierre Madiot


16 mai 2006

Nous rentrions heureux de ces classes promenades (Georges Lopez)

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Pyrénées-Orientales




Nous rentrions heureux de ces

classes promenades

Georges LOPEZ


Nous rentrions heureux de ces classes promenades qui n'étaient que promenades récompenses. Combien de fois l'avons-nous entendu ! «Si tout le monde travaille bien, nous sortirons samedi après-midi». C'était à l'époque des trente heures !0361
De ces escapades je rapportais toujours une plante, une fleur, une feuille morte, un caillou mystérieux et unique par les veines qui l'ornaient, un bout de bois étrangement humain ou bien un insecte desséché que j'aurais voulu voir ressusciter dans mes mains.

Sur le chemin du retour, nous entonnions les chansons apprises en classe et, de coquelicot_gentil_jardin_landes_biscarrosse_629268«Gentil coquelicot» à «Colchiques dans les prés» en passant par le sempiternel «Il était un petit navire», nous épuisions notre répertoire en évitant soigneusement «La Marseillaise». Il arrivait parfois que du fond de la colonne qui s'étirait sur la route nous parviennent les accents d'une chanson grivoise habituellement chantée en catalan et donc doublement interdite à l'école. Emportés par le désir de transgresser la règle, les derniers en oubliaient la prudence. Ceux qui, en tête, côtoyaient les maîtresses, effrayés à l'idée d'une punition collective, s'empressaient de chuchoter un «taisez-vous» suivi du «faites passer» de circonstance. Je crois surtout que nos institutrices faisaient semblant de ne pas entendre, tout bonnement parce que nous n'étions pas dans l'enceinte de l'école. Par contre, nous étions bien prévenus : en cas de visite inopinée de l'inspecteur, ne prononcer aucun mot en catalan.

Ces visites d'inspection, on se demande pourquoi, nous procuraient une certaine peur. Peut-être la maîtresse elle-même nous transmettait-elle sa propre angoisse ? En fait, ce personnage était pour nous un intrus, celui qui s'invite quand bon lui semble. Droit comme un «i», d'allure plutôt sévère dans son costume sombre, il semblait nous regarder individuellement derrière ses petites lunettes. Au fond, à le voir classe_1956_primairedéambuler parmi nous, de rangée en rangée, montant et descendant, s'arrêtant de temps à autre pour feuilleter un cahier, nous avions l'impression qu'il était venu pour nous. Aussi, penchés sur nos pages, silencieux, nous faisions chanter nos plumes Sergent-major. Pas question d'interpeller un voisin ou de se retourner. Seul, un regard lancé à la dérobée au plus proche camarade, les yeux écarquillés comme pour dire : «Attention !»

Morale : «L'amour du travail bien fait». Écriture ; les pleins et les déliés de la lettre «F». Lecture : «Au jardin du Luxembourg». Calcul : l'addition et la multiplication des nombres à virgule. Les leçons et les exercices se succédaient dans un silence royal. Venaient ensuite la récitation et le chant. Mme Adroguer choisissait les élèves qui diraient les textes appris à ce jour. Je me revois encore tout près de l'estrade récitant «Demain, dès l'aube,__l_heure_o__blanchit à l'heure où blanchit la campagne, / Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m'attends. / J'irai par la forêt, j'irai par la montagne / Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.» J'aimais ces vers de Victor Hugo. Je me les répétais souvent entre la maison et l'école et chaque fois ma pensée s'évadait vers Edmée, bien vivante, elle, en détachant bien : «Je sais que tu m'attends». Ce jour-là, la présence de l'inspecteur aurait dû m'intimider, me paralyser même. Il n'en fut rien car je dis le texte les yeux rivés sur l'objet de ma passion.

Georges Lopez, Les petits cailloux. Mémoires d'un instituteur,
Stock, septembre 2005, p. 60-62.



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- un commentaire du livre : Les Petits cailloux. Mémoires d'un instituteur

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le village de Millas (Pyrénées-Orientales) autrefois


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16 mai 2006

Réponse à l'article de M. André Ouzoulias (Mireille Baux-Grandval)

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Réponse à l'article de M. André Ouzoulias

Mireille BAUX-GRANDVAL



Réponse à l'article de M. André Ouzoulias,
Libération
du 4 janvier 2006.

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L'article de M.Ouzoulias du 4 janvier dernier contient tant d'erreurs que je ne peux les laisser passer.
Il est faux de dire que «le B-A, BA est enseigné [au CP] dès le début de l'année».

Tous les parents peuvent le vérifier : au CP, on commence par la «semi-globale», c'est-à-dire en continuant ce qui a été pratiqué dans les deux dernières années de maternelle et qui est bel et bien de la « globale » telle qu'elle est décrite dans deux documents officiels : Qu'apprend-on à l'école maternelle ? et dans le chapitre «Cycle des apprentissages fondamentaux –cycle 2» extrait du bulletin officiel n°1 du 14 février 2002 [http://www.education.gouv.fr/bo/2002/hs1/cycle2htm], où l'on peut lire qu'au CP, l'élève «poursuit et complète le travail commencé à l'école maternelle» ( p.3). Or, comme le dit le premier document, à la fin de la maternelle, on doit se demander : «L'élève est-il capable d'identifier instantanément les mots classés dans les cinquante premiers rangs de la liste de fréquence ? (…) La reconnaissance des mots est un point d'appui important pour la lecture, car elle prend moins de temps que le déchiffrage intégral de chaque mot rencontré.»
Et tous les parents savent qu'en maternelle les enfants apprennent à reconnaître des étiquettes, et non pas à lire des lettres et à apprendre le son qu'elles «ont» !
Et, au CP, on continue selon cette méthode au moins jusqu'à la Toussaint.

M. Ouzoulias brandit le spectre de la dyslexie, pour inquiéter les parents, affirmant que c'est dans les années 60 que se produisit le «boum» de la dyslexie, alors que, tout simplement, c'est à ce moment-là que l'on tenta de sensibiliser les instituteurs à ce problème et que l'on commença donc à dépister les éventuels dyslexiques.
Ce que ne dit pas M. Ouzoulias, en revanche, c'est que depuis les années 70 et de plus en plus, les2856168299.08.lzzzzzzz orthophonistes voient se précipiter dans leur cabinet de «vrais-faux dysléxiques», dont les quatre cinquièmes sont en fait des «mal appris» de la lecture. M. Ouzoulias n'a sans doute pas lu le livre de l'orthophoniste Colette Ouzilou, La dyslexie, une vraie-fausse épidémie (Presses de la Renaissance, 2001), qui analyse très bien le problème, affirmant que ce départ d'apprentissage de la lecture en «globale» va induire des réflexes désastreux chez 40% des élèves, réflexes dont ils ne parviendront pas à se défaire ! D'ailleurs, c'est une méthode syllabique qu'utilisent les orthophonistes lorsqu'ils rééduquent les "mal appris" de la lecture...

De même, M. Ouzoulias prend comme preuve du supposé mauvais fonctionnement de la méthode syllabique, le taux élevé de redoublants en CP – «plus de 30% au milieu des années 60». Or il semble avoir «oublié» que, depuis la loi Jospin de 1989, aucun élève, sauf exception, ne doit redoubler le CP, et qu'il y a des «quotas» très stricts de redoublements à respecter, et tant pis pour ceux qui passent en CE1 alors qu'ils ne savent pas lire !

benp70001Et M.Ouzoulias me semble particulièrement de mauvaise foi lorsqu'il met en avant «le nombre de classes de perfectionnement et de classes d'adaptation» qui accueillaient, en fait, des enfants psychologiquement très fragiles, et parfois légèrement déficients, ayant besoin d'un enseignement adapté à leur handicap. Il faut dire que ces enfants existent toujours mais que, pour des raisons budgétaires, on a supprimé ces classes spécialisées, et qu'on a décidé d'inscrire ces enfants dans les classes «régulières», ce qui n'est favorable à personne.

Enfin, comble de la mauvaise foi, c'est au nom des valeurs de «solidarité, d'égalité, d'éducabilité (sic) et de démocratisation du savoir» que M. Ouzoulias prend son « gourdin » de pèlerin pour démolir la méthode syllabique.

Comme si ce n'était pas pour permettre au plus grand nombre d'avoir accès à un vrai savoir et à de vraies connaissances que nous nous battons ! Comme si nous ne tenions pas le plus grand compte de l'état dans lequel se trouve aujourd'hui l'école de la République ! C'est grâce à la maîtrise de la lecture dès la fin du CP que l'élève pourra progresser dans sa scolarité, à condition, bien sûr, que les programmes des années suivantes soient riches ! Car moins l'école transmet de connaissances et plus elle est inégalitaire, puisque les enfants des milieux modestes n'ont que l'école pour s'instruire ! Tous ceux, donc, qui approuvent les réformes de ces dernières décennies, et particulièrement celle de 1989 (loi Jospin) sont profondément «anti-égalitaires» et «anti-démocratiques». Les effets de cette réforme sont désastreux, comme l'avait écrit M. Jean Ferrier, chargé officiellement par le ministère de faire, en 1998, un rapport sur l'école primaire après huit ans de réforme Jospin. Son rapport commence ainsi «On peut estimer à environ 25% d'une classe d'âge la proportion des élèves en difficulté ou en grande difficulté à l'entrée au collège.» [Ce rapport estcouv422 disponible sur le site de la documentation française]

Enfin, on notera que M. Ouzoulias ne nomme pas les sites Internet dont il extrait des mots d'ordre. Là aussi, l'amalgame est malhonnête puisque l'on reconnaît des sites qui mélangent lutte pour une école de qualité et programme de droite dure (suppression des syndicats), et des sites pour lesquels compte avant tout une école de qualité. Et c'est pour cela qu'ils réclament la suppression des IUFM (institut de «formatage» des maîtres) ! On comprend bien que M. Ouzoulias, qui y enseigne , y soit opposé ! Mais le public ignore sans doute que ce sont les mêmes professeurs qui enseignent dans ces instituts ET notent leurs étudiants et donc valident leurs années de formation ou non ! Ils ont beau jeu, après, à demander à leurs étudiants de critiquer l'enseignement qu'ils reçoivent !

En fait, en matière de lecture, on a affaire, en France, à un dogme : on n'a pas le droit de le critiquer. Or, comme depuis quelques années des livres ont paru qui décrivent TOUS la crise de notre enseignement et, plus particulièrement, de notre enseignement primaire avec gros plan sur l'enseignement de la lecture selon la méthode semi-globale, les grands prêtres de cette méthode, fort bien introduits auprès des médias, sont tous montés au créneau.
Ils n'ont de cesse de traiter de «réactionnaires» ceux qui veulent réintroduire une méthode qui marche, car elle est fondée sur le bon sens – partir du simple pour aller vers le complexe.

Prétendre défendre «l'intérêt des enfants» en falsifiant comme cela la vérité, et parler au nom «des professionnels de l'enseignement de la lecture» me paraît malhonnête. Je ne connais de «professionnels de la lecture» que ceux qui sont sur le terrain, c'est-à-dire les instituteurs, qui voient tous les jours les dégâts causés par la semi-globale, et les professeurs de lycée et collège qui sont impuissants à aider tous les élèves – nombreux – qui lisent mal !

Enfin, je me demande pourquoi, lorsqu'on répond à un article paru dans «Rebonds» en démontrant, documents à l'appui, qu'il contient des affirmations erronées, on n'est JAMAIS publié !
Libération aurait-il des convictions qui confinent au respect absolu du dogme ?

Mireille Baux-Grandval, professeur agrégé de grammaire.
Mission économique de Rangoun
14 janvier 2006

- source de cet article : Sauver les Lettres



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Méthode Boscher, Belin, 2005


16 mai 2006

Le pédagogisme facteur d'échec (Liliane Lurçat)

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les IUFM, lieux du décervelage pédagogiste




Le pédagogisme facteur d'échec

Liliane LURÇAT


Article paru dans Philosophie politique, "Ecole et démocratie", n°10, novembre 1999, P.U.F..

I. Le modèle américain

L'école française est devenue l'école des sciences de l'éducation. Dans cette école, les sociologues et les pédagogistes rejettent la singularité de la personne au nom de déterminismes liés principalement à l'origine sociale (1). Dans les IUFM on prétend former des professionnels de l'enseignement, sans tenir compte des disciplines à enseigner. En réalité la pédagogie n'est pas séparable des connaissances à transmettre, elle prend des formes différentes selon les disciplines. A l'inverse, le pédagogisme sépare la pédagogie des disciplines, il veut se situer au-dessus des connaissances à transmettre, auxquelles il substitue un arsenal de techniques et de procédés.

Pour comprendre l'école française d'aujourd'hui, il faut connaître l'évolution de l'école aux États-Unis. L'école de masse telle qu'elle est actuellement développée en France s'inspire de l'école publique américaine, dont la massification a été entreprise dès le début de ce siècle. La grave crise que traverse l'école publique américaine, ravagée par l'illettrisme et par la violence, ne freine nullement l'enthousiasme des réformateurs pour les sciences de l'éducation et pour l'égalitarisme.

C'est aux États-Unis que la mise en oeuvre des théories des sciences de l'éducation a été généralisée en premier lieu. On s'est contenté ici de reprendre et d'imiter les pratiques américaines. Nul besoin de penser l'école française dans son histoire et dans sa spécificité : on disposait d'un modèle qu'on peut plaquer littéralement pour être scientifique et pour aller dans le sens de l'histoire. Il suffisait donc de s'en servir.

Un problème politique
L'idée qu'on peut changer le monde en agissant sur les enfants, écrit Hannah Arendt (2), est une utopie politique mise en œuvre dans les régimes dictatoriaux. Mais, "dans un pays d'immigrants, le rôle politique2070325032.08.lzzzzzzz1 que joue bel et bien l'éducation, le fait que les écoles ne servent pas seulement à américaniser les enfants mais affectent aussi leurs parents, et contribuent à se défaire d'un monde ancien pour entrer dans un nouveau, tout cela entretient l'illusion que grâce à l'éducation des enfants un nouveau monde est en train de s'édifier."
La gravité de la crise de l'éducation tient au rôle que joue la notion d'égalité en Amérique. Dès 1910, écrit Jacques Barzun, au cours de la dernière phase du libéralisme, on a proclamé l'émancipation de tout le monde, y compris les enfants ; on a ainsi abouti à un égalitarisme absolu (3). C'est ainsi qu'on nie le rôle des aptitudes ou des dons et qu'on refuse toute oligarchie, y compris l'oligarchie fondée sur le mérite, car, dit Hannah Arendt, la méritocratie contredit le principe de démocratie égalitaire.
La massification de l'enfance (4) est apparue aux États-Unis bien avant l'existence de la télévision. Elle a consisté dans l'abandon des enfants par les adultes, car seul le groupe a été pris en considération. Livrés à eux-mêmes ou abandonnés à la tyrannie du groupe, écrit Arendt, les enfants ont réagi soit par le conformisme, soit par la délinquance juvénile. La signification de la crise de l'éducation est liée au caractère politique de ce pays, poursuit-elle. "Nulle part les problèmes d'éducation d'une société de masse ne se sont posés avec tant d'acuité, et nulle part ailleurs les théories pédagogiques modernes n'ont été acceptées de façon si servile et si peu critique (...). Cette crise annonce la faillite des méthodes modernes d'éducation.

Origines des sciences de l'éducation
Claude Allègre redécouvre (mais le sait-il?) la pensée de Stanley Hall, quand il annonce que désormais l'enfant est au centre du système éducatif. Stanley Hall, "prêtre, prophète, poète et savant" selon latenenbaum_fig02b description de Daniel Boorstin (5), s'initie à la psychologie expérimentale en Allemagne avant de fonder en 1889 la Clark University à Worcester (Massachussetts). Il en fait un ma_col_clark02établissement pilote dans le domaine de la psychologie et de son application à la pédagogie. L'étude de l'enfant devait, dans son optique, conduire à réviser les conceptions qu'on se faisait des programmes scolaires. Jusqu'à son époque, écrit Stanley Hall, l'éducation était scolocentrique, maintenant elle allait devenir pédocentrique. Stanley Hall a élaboré sa psychologie de l'enfant à partir de dizaines de milliers de questionnaires. Il en a tiré des normes pour définir la croissance intellectuelle et physique des enfants.

À partir de ses études statistiques, Stanley Hall veut réviser non seulement les programmes scolaires, mais la conception même de l'idée de programme. Il annonce : "Nous devons dépasser le fétichisme de l'alphabet, de la table de multiplication, de la grammaire, des gammes, du livre". Prévoyant le déclin de la grammaire et le règne de la langue parlée dans l'Amérique du XXe siècle, il annonce que la grammaire, la rhétorique et la syntaxe seraient remplacées par les "arts du langage", plus démocratiques, et l'expression orale en public.

Dès 1902, et je cite toujours Boorstin, tandis que l'enseignement secondaire gratuit était devenu une institution, il passe à l'étude de l'adolescence. Il demande dans son livre The high school as the People's College qu'on attache moins d'importance à l'exercice répétitif, à la discipline, au savoir faire ou à l'exactitude, et davantage à la liberté et à l'intérêt personnel. Il demande que la communauté des adolescents se développe et se gouverne elle-même, comme n'importe quelle autre communauté aux Etats Unis.

Le débat public rapporté par Boorstin entre Stanley Hall et Charles W. Eliot pose la question du sens à donner au mot égalité. Deux conceptions s'affrontent pour prendre la direction des nouvelles écoles secondaires américaines. Eliot croyait que "toute éducation démocratique avait pour devoir non seulement d'instruire l'ensemble de la population mais aussi d'encourager le développement d'une aristocratie naturelle afin que la communauté tout entière reçoive les fruits de l'épanouissement de ses citoyens les plus capables". Pour Eliot, la démocratie consiste aussi à mettre toutes les disciplines sur un plan d'égalité, et l'étudiant choisit ce qu'il veut étudier.

Les adversaires d'Eliot ont à leur tête Stanley Hall et son disciple John Dewey, chef de file de l'Educationjohndewey Nouvelle. Boorstin écrit d'eux : ils se firent les champions de ceux que Hall appelait "la grande armée des incapables". Dans le projet d'Eliot, l'école secondaire est uniforme et les matières sont enseignées de la même façon à tous les élèves. Stanley Hall s'interroge : "que deviendrait la foule de ceux chez qui les déterminismes de l'hérédité entraînent un ralentissement ou même l'arrêt du développement mental ?" Réponse d'Eliot : "tout directeur d'école qui organiserait les études en fonction de ces incapables serait un individu professionnellement dément". Eliot pensait en termes de matières d'enseignement ; Stanley Hall, John Dewey et leurs disciples voulaient affranchir les élèves de la notion même de programme.

John Dewey, qui devint par la suite "l'éducateur le plus influent du XXe siècle", ouvre une école-laboratoire à l'Université de Chicago. Il insiste sur l'activité dans un cadre champêtre, la ferme telle qu'il l'avait connue dans son enfance. Il supprime les vieux concepts de discipline, de matières d'enseignement et même de programme d'études. Toutes les matières devaient être réunies dans des activités communes. La high school, écrit Boorstin, est le produit achevé de l'Education Nouvelle.

La destruction de l'enseignement
Selon Jacques Barzun (6), l'illettrisme fonctionnel touche soixante millions d'Américains. Il y a eu un très jacquesbarzun0226038475bon système scolaire qui a été détruit par une doctrine pernicieuse sur la manière d'apprendre. En réalité, écrit-il, l'enseignement est un art et il ne peut être réduit à une science imposant une méthodologie. Au fil des articles rassemblés dans son livre, Jacques Barzun fait des constats accablants. On n'apprend plus à lire aux jeunes, l'illettrisme atteint la majorité de la population. On est revenu à une époque où seule une élite savait lire et écrire. A l'origine de ce désastre, cinquante années de folie dans l'utilisation de la méthode look-and-say associée à l'idée que les enfants de pauvres, de Noirs, d'Hispaniques, ne peuvent pas apprendre. Car être défavorisé est considéré à présent comme une entrave insurmontable pour apprendre. C'est une absurdité criminelle écrit Barzun, ce sont les particularités de l'école qui bloquent l'apprentissage en lecture, en écriture et en calcul. Quelles sont, s'interroge Barzun, les raisons qui ont conduit l'Amérique à devenir un pays où l'illettrisme s'est tellement développé ? Ce n'est ni l'ignorance, ni la pauvreté, ni les instincts barbares. C'est une pensée progressiste caractérisée par l'amour de la liberté et le désir d'innover qui est à l'origine de cette situation.

On a voulu rendre les enfants créateurs, mais la créativité ne peut être un objet d'apprentissage car elle ne s'enseigne pas. L'enfant doit apprendre les rudiments avant de "créer" un poème.
La doctrine look-and-say d'enseignement de la lecture a été popularisée en France et imposée dans les lieux de formation par les scientistes de la lecture (7). On part de l'idée que le lecteur entraîné n'a pas besoin deprimer3 nommer chaque lettre et c'est le modèle imposé au débutant, quintessence de l'anti-méthode, écrit Barzun. Les forces hostiles à l'alphabétisation, à la lecture, au mot, se trouvent dans le scientisme qui depuis 75 ans préfère les nombres aux mots, le faire à la pensée, l'expérience à la tradition.

La science est devenue une superstition, écrit Barzun, il a fallu plus d'un demi-siècle pour commencer à comprendre l'erreur de look-and-say, non pas en partant des défauts de la méthode mais en partant d'une autre étude. Le cheminement a été le même en France puisqu'il a fallu que les idées exprimées dans cette autre étude soient connues en France pour que certains scientistes de la lecture osent évoquer discrètement la possibilité d'un retour en arrière(8).
Les dîplomés de la high school ne savent pas lire et écrire de manière acceptable. Ils connaissent très peu d'histoire et de géographie. Ils sont très ignorants en mathématiques, sciences et langues étrangères écrit Barzun. On ne peut pas demander aux élèves de connaître ce qu'on a refusé de leur transmettre. L'antidote consisterait à retrouver l'unité et la continuité de la pensée par l'unité et la continuité dans le travail. La généralisation trop rapide de l'enseignement secondaire à partir de 1900 n'a pas permis de former des professeurs. Engagés hâtivement, souvent peu instruits, ils ont transmis leur insuffisance et ils ont contribué à enfoncer les élèves dans la violence et dans la grossièreté.



II. L'école française, une école sous influence

De l'égalité des droits à l'égalité des personnes
L'école unique est un thème qui a été lancé par les Compagnons de l'Université Nouvelle en 1921 et qui a inspiré les rédacteurs du plan Langevin-Wallon (1947) de réforme de l'enseignement. Dans ce plan, il était question d'égalité des droits des enfants : "Tous les enfants, quelles que soient leurs origines familiales, sociales, ethniques, ont un droit égal au développement maximum que leur personnalité comporte. Ils ne doivent trouver d'autres limitations que celles de leurs aptitudes".

Dans la loi d'orientation sur l'éducation du 10 juillet 1989, il n'est plus question d'égalité des droits mais d'égalité des élèves : "Pour assurer l'égalité et la réussite des élèves, l'enseignement est adapté à leur diversité par une continuité éducative au cours de chaque cycle et tout au long de la scolarité".

Selon Guy Berger (9) l'hétérogénéité des élèves justifie les transformations apportées à l'école française. Dès la fin des années 50, le débat sur le collège unique a fait émerger l'idée selon laquelle on doit teniraffact compte de l'hétérogénéité des élèves, en adaptant l'enseignement à l'ensemble de la population. Dans les années 1970 on introduit l'enseignement différencié, le travail autonome, la pédagogie du projet. En même temps les relations des professeurs avec les élèves sont modifiées, on passe de l'information à la communication, de la transmission à la négociation. La création des zones d'éducation prioritaires est une décision importante dans laquelle on peut voir l'interprétation à la française de l'affirmative action. Ce dernier mouvement est né aux États-Unis à la suite des émeutes noires de 1964-1968.

On accuse la politique d'affirmative action d'être inégalitaire au profit des anciens opprimés, écrit Daniel Boorstin. Guy Berger reprend cette idée à son compte pour justifier la création des ZEP. Les ZEP sont d'une certaine manière inconstitutionnelles, écrit-il, puisque selon les principes de la Constitution le service public offert à tous les citoyens doit être identique, quel que soit le lieu où il est assuré.

Les sciences de l'éducation dans l'école
Lors de la création des IUFM, Philippe Meirieu a été sollicité par le recteur Bancel pour définir notamment les capacités requises pour enseigner. Il est à présent directeur de l'Institut National de la Recherche Pédagogique. C'est un pédagogiste, partisan de l'égalité des élèves. Dans de nombreux ouvrages il défend2710110865.08.lzzzzzzz des conceptions où le pédagogisme tient un rôle déterminant dans l'école (10).
On peut citer les idées suivantes : l'école doit s'attacher à faire acquérir des capacités méthodologiques communes à tous les apprentissages. On ne doit pas introduire des notions sans restituer les conditions de leur apparition : les élèves devraient vivre en raccourci la genèse des connaissances et se les approprier activement. Meirieu veut se situer dans une perspective "transdisciplinaire", il refuse toute légitimité au découpage habituel en disciplines, car les disciplines perdent toute chance de servir la mission de l'Ecole si elles ne s'ordonnent pas autour d'un axe commun fourni par les pédagogues (pédagogistes). L'évaluation joue un rôle fondamental, elle doit être l'objet essentiel des préoccupations des élèves.
Meirieu se défend des critiques nombreuses de tous ceux qui contestent les sciences de l'éducation et le rôle qu'on veut leur faire jouer dans la réorganisation de l'école. La loi d'orientation, écrit-il, a permis la professionnalisation du métier d'enseignant grâce à la création des IUFM. Ce sont les "militants pédagogiques" qui ont fourni des formateurs, des conseillers, des chefs d'établissement et des inspecteurs.

Le projet de Meirieu est ouvertement et explicitement politique : "Pour notre part, nous faisons clairement 2259187218.08.lzzzzzzzet absolument le choix de la prééminence absolue du politique"(11). Il veut lutter contre une société duale, non fraternelle, pour créer enfin, grâce à l'école, une société fraternelle. Il défend l'hégémonie des pédagogistes contre les républicains "intégristes" et les "ultra libéraux thatchériens". Il justifie la massification de l'école car "le mixage des enfants de tous les niveaux permettra d'unifier les pensées en une pensée commune". Dans l'école de ses rêves il ne doit y avoir ni redoublement, ni orientation précoce, ni compétition, ni hiérarchisation des élèves en bons, moyens, mauvais. Car ce n'est plus l'école de l'instruction obligatoire, mais l'école obligatoire.

Les idées de Meirieu reprennent l'esprit des sciences de l'éducation américaines, avec en particulier le refus de la transmission. Il dénigre systématiquement l'instruction. Les deux objectifs qu'il assigne à l'école obligatoire sont "l'acquisition d'une culture commune et la construction de la Loi". Pour lui l'école n'est pas un service, mais une institution, qu'il met sur le même plan que l'armée et la justice. Comparaison qu'il justifie en invoquant le caractère nécessairement autoritaire de ces deux dernières. En somme, dans la conception qu'il défend, le service militaire obligatoire serait remplacé par treize années d'endoctrinement obligatoire.
L'angélisme du discours masque difficilement une volonté politique que dénonçait déjà Hannah Arendt : la volonté de changer la société en agissant sur les enfants. Le modèle égalitariste de la high school semble lemeirieu_1_1 fasciner aussi, mais il est plus proche de la position de Stanley Hall et de son élève John Dewey que de celle de Charles W. Eliot, qui affirmait la nécessité d'une oligarchie fondée sur le mérite. Enfin, Meirieu récuse l'idée d'un échec lié à la destruction des méthodes de transmission des automatismes de base, destruction bien mise en évidence par Jacques Barzun. En somme, il participe à l'entreprise de délégitimation des connaissances, des valeurs et de leur transmission, dont les effets dévastateurs sont déjà connus.

* * *


L'imitation non critique d'une école en crise a des raisons multiples. Ce n'est pas seulement la séduction des méthodes nouvelles d'éducation appliquées à une grande échelle aux Etats-Unis. L'école américaine ouverte à toutes les nouveautés a été la terre d'élection du scientisme. Les sciences de l'éducation se sont imposées comme un pouvoir politique au sein de l'école, décidant non seulement de la manière d'enseigner mais également du découpage des disciplines et de leur légitimité. La manière d'enseigner la lecture imposée par les scientistes a contribué à l'illettrisme de masse. La gestion des disciplines par les sciences de l'éducation débouche sur l'annihilation de secteurs entiers de la connaissance dans l'école publique.

Un facteur politique domine les autres, c'est l'ambiguïté du modèle d'école que donne un pays d'immigrants. Cette ambiguïté, bien analysée par Hannah Arendt, amène à utiliser des méthodes dictatoriales dans des buts d'intégration : on rabote les différences pour assimiler les nouveaux venus. Mais tout bascule quand on veut passer de l'égalité des droits à l'égalité des personnes, en imposant à tous le même vide intellectuel et culturel aux effets barbarisants. La massification de l'enfance et de la jeunesse ainsi réalisée produit partout des phénomènes semblables. Faut-il s'étonner quand on observe, en France aussi, la coïncidence du conformisme de masse et de la montée de la délinquance juvénile ?


Références

1) Liliane Lurçat, Vers une école totalitaire? La massification de l'enfance à l'école et dans la société,2868395422.08.lzzzzzzz François-Xavier de Guibert, 1998.
(2) Hannah Arendt, La crise de l'éducation, in La crise de la culture, coll. "Idées", Gallimard, 1972.
(3) Jacques Barzun, Begin here. The forgotten conditions of teaching and learning, The University of Chicago Press, 1991.
(4) Liliane Lurçat, Vers une école totalitaire ?, op. cit.
2221067983.08.lzzzzzzz(5) Daniel Boorstin, Histoire des Américains, coll. "Bouquins", Robert Laffont, 1991.
(6) Jacques Barzun, op. cit.
(7) Liliane Lurçat, La destruction de l'enseignement élémentaire et ses penseurs, François-Xavier de Guibert, 1998.
(8) Observatoire National de la lecture, Apprendre à lire, CNDP, Odile Jacob, 1998. Voir p. 90.
(9) Guy Berger, Cahiers Pédagogiques, n°292-293, mars-avril 1991.
(10) Philippe Meirieu, L'envers du tableau. Quelle pédagogie pour quelle école ? Paris, ESF, 1994. Voir aussi Philippe Meirieu et Marc Guiraud, L'école ou la guerre civile, Plon, 1997.
(11) Philippe Meirieu, Marc Guiraud, L'école ou la guerre civile, op. cit.


Liliane LURÇAT
Directeur de recherche honoraire au CNRS (psychologie de l'enfant).
Docteur en psychologie, Docteur ès Lettres et Sciences Humaines.


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Quelques ouvrages récents de Liliane Lurçat

- Le jeune enfant devant les apparences télévisuelles, Desclée de Brouwer, 1994.
- Le temps prisonnier. Des enfances volées par la télévision, Desclée de Brouwer, 1995.
- La destruction de l'enseignement élémentaire et ses penseurs, François-Xavier de Guibert, 1998.
- Vers une école totalitaire ? L'enfance massifiée à l'école et dans la société, 2e éd., François-Xavier de Guibert, 1998.
- La manipulation des enfants : nos enfants face à la violence des images, éd. du Rocher, 2002.

On peut aussi télécharger le texte de Liliane Lurçat sur : Sauver les lettres


2005_02_28


16 mai 2006

Journal d'une institutrice clandestine (Rachel Boutonnet)

19186





Journal d'une institutrice clandestine

Rachel BOUTONNET


Je suis une jeune institutrice : ma troisième année d'enseignement vient de se boucler. Je sais, le terme de "clandestine" peut faire sourire. Pourtant, j'insiste. J'efface soigneusement le tableau quand je quitte ma classe pour qu'on ne voie pas trace de mon travail, je fais recouvrir de papier kraft les manuels avec lesquels mes élèves apprennent à lire - et que j'ai achetés sur mes deniers. Je tais soigneusement mes convictions et beaucoup de mes méthodes. Elles n'ont pas l'heur de plaire à certains de mes collègues et, en tout cas, elles répugnent franchement aux membres de l'inspection.

En fait, dès mon entrée à l'Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM), j'ai presque aussitôt compris que je n'avais rien à en attendre. Nous avons passé en tout et pour tout six heures sur l'année à l'enseignement de la lecture et de l'écriture ! Le credo des formateurs se résumait à : "Le maître ne doit pas être un reférent pour l'apprenant [l'enfant]."

J'ai donc résolu de me comporter en reporter clandestin. De septembre à janvier j'ai tenu un journal tous les soirs, pour résumer mes journées et mes impressions.

Quand l'année s'est achevée, j'étais épuisée, je ne me sentais pas du tout formée au métier mais j'étais au moins indemne moralement.

lapinJ'applique aujourd'hui des méthodes pédagogiques auxquelles j'ai longuement réfléchi, qui sont aussi précisément celles que l'IUFM voue aux gémonies, mais je vois mes élèves apprendre et en être fiers.

Un document authentique et passionnant : les réflexions stupéfaites, incisives et incroyablement lucides d'une jeune institutrice, pour la première fois confrontée à l'école telle qu'elle est conçue aujourd'hui. On croit rêver parfois...


* Rachel Boutonnet, née en 1972, titulaire d'une maîtrise de philosophie, est maîtresse d'école depuis septembre 2000, en classe de CP et CE1. Elle fait partie des associations Reconstruire l'école, Sauver les lettres.

4e de couverture du livre





- Journal d'une institutrice clandestine, Rachel Boutonnet, Éditions Ramsay, Août 2003, 286 pages, 20 € ; éd. poche octobre 2005.

- le dernier livre de Rachel Boutonnet : Pourquoi et comment j'enseigne le b.a.-ba : Conseils et récits2841147444.08.lzzzzzzz d'instits à l'usage des collègues débutants et des parents curieux, Ramsay, 2005.

- débat entre Luc Ferry et Rachel Boutonnet (2003)

- Rachel Boutonnet sur France 2 : reportage diffusé au cours du journal de 20h sur France 2 le 15 novembre 2005.












Il faut fermer les IUFM et envoyer

leurs prétendus formateurs et autres "spécialistes en

sciences de l'éducation" enseigner dans les ZEP...!

Michel RENARD



Je n'avais pas encore lu l'ouvrage de Rachel Boutonnet. Je suis en train de le faire - après ceux de Marc Le2350130355.08.lzzzzzzz3284114688x.08.lzzzzzzz12234056756.08.lzzzzzzz2 Bris, de Fanny Capel, de Jean-Paul Brighelli... - et je suis effaré...! C'est encore pire qu'imaginé.

La charge de Rachel Boutonnet contre l'obscurantisme des "formateurs" de l'IUFM, et leur incroyable prétention à nier les désastres de leurs "méthodes", a fait mal. Pour répliquer à certaines critiques et, surtout, faire partager son expérience d'institutrice, elle a publié un deuxième ouvrage : Pourquoi et 2841147444.08.lzzzzzzz1comment j'enseigne le b.a.-ba : Conseils et récits d'instits à l'usage des collègues débutants et des parents curieux (Ramsay, 2005).


Contraint de lui répondre, "l'institution" pédagogiste vient de dépêcher l'un de ses piliers en la personne d'Évelyne Charmeux, théoricienne de la méthode globale, aujourd'hui professeur honoraire de171994 l'IUFM de Toulouse. Évelyne Charmeux qui, avec ses collègues, et ceux qui leur ont abandonné tout pouvoir en matière de pédagogie (gouvernements de gauche comme de droite...) relèveraient d'un Tribunal pour Crimes contre les Humanités...

Le texte a été édité par le site ouvertemment acquis à la pédagogie "constructiviste", le Café pédagogique. Madame Charmeux s'en prend violemment à Rachel Boutonnet avec des arguments qui font peine à lire. En voici quelques-uns.

- "Un tout petit a beaucoup de mal à distinguer les objets à lire des autres objets de son environnement : pour lui, les affiches poussent sur les murs comme les feuilles sur les arbres et la différence profonde de nature qui les sépare lui est étrangère".
Alors, pour vous, un gamin de six ans confond les feuilles des arbres avec les affiches sur un mur...!!? Vous ne prendriez pas les gens pour des demeurés parfois ? Vous n'avez aucun contact avec des enfants de cet âge, Madame Charmeux, pour énoncer une telle énormité. Ou alors, malheureusement, ce sont des enfants lourdement handicapés... D'ailleurs les méthodes globales ont été mises au point pour des enfantsce1_ce2 déficients.






"Enfants regardant pousser des affiches sur un mur"
(légende à la mode Charmeux)


- "Le caractère «arbitraire» de l'union entre un mot (un «signifiant») et son sens (le «signifié»), ce qu'on appelle «l'arbitraire du signe linguistique», dont on doit la mise en évidence à F. de Saussure, lui est complètement inconnu. C'est pourquoi, avant l'apprentissage systématique de la lecture, il est souhaitable que les enfants aient eu l'occasion de le découvrir".
On ne peut découvrir l'arbitraire du lien entre le signifiant locomotive et le signifié véhicule de traction servant à remorquer les trains, qu'après avoir été capable de lire lo-co-mo-ti-ve, donc de déchiffrer ses différentes syllabes. Ce dont ne sont plus capables un nombre croissant d'élèves sortant de l'école primaire. En l'occurrence, "l'arbitraire" c'est d'abord celui d'une pédagogie qui désarme intellectuellement les élèves... et les rend incapables de poursuivre un jour des études de... linguistique.

- "En travaillant comme vous le faites, vous fournissez aux enfants des clés qui n'ouvrent que les portes ouvertes, et ce que vous leur apprenez n'a pas plus d'utilité que le tabouret pour apprendre à nager. On peut ajouter que cela les éloigne même de la lecture véritable, notamment de celle dont ils auront besoin dans leurs études".
Mais, Madame Charmeux, avec quelle méthode avons-nous donc appris à lire et à aimer la lecture, avant que vous n'imposiez votre "méthode globale" ? Les plus grands lecteurs, les plus grands écrivains, comme les simples gens qui fréquentaient l'école avant la prise du pouvoir par les théoriciens du "globalisme", ont appris à lire avec la méthode syllabique. Ils ne se sont pas ennuyés, ils ont accédé au "sens" sans les torturantes devinettes imposées par vos dogmes aveugles. Quel aplomb et quelle cécité sur la réalité vous manifestez ! Le globalisme (et le semi-globalisme... et tout ce qui y ressemble) a produit des bacheliers et des étudiants incapables de lire sérieusement. Et ce n'est pas par manque d'exercices sur les "discours", comme vous le prétendez, c'est tout simplement parce que vous les avez privés des bases de la lecture.

À lire ce condensé de la théorie "globaliste", on se rend compte que Madame Charmeux refuse tout apprentissage conçu comme une progression, comme une suite d'étapes. Non, pour elle, il faut tout faire tout de suite : "on ne peut apprendre qu'en situation complète, afin de connaître d'emblée chacun des éléments de la complexité, sans quoi aucune maîtrise ne peut être construite"...ou encore "plus on retarde la familiarisation avec ces modes de discours - totalement différents dans leurs composantes et dans leurread0 fonctionnement de ceux utilisés dans les relations quotidiennes - et plus on rend impossible leur maîtrise". Quand une telle exigence va à l'encontre d'une longue observation de terrain, il faut la prendre pour ce qu'elle est : une croyance dogmatique.

Autre assertion aberrante au sujet de la méthode syllabique. Madame Charmeux prétend que : "le mécanisme de base prend tout bonnement la place de la lecture : combiner des lettres pour former des sons devient à la fois un jeu et le but de l'activité de lecture, aux dépens de la recherche du sens".

Mais où vont-ils chercher cela ? La recherche de sens est freinée par toute une série d'obstacles, à commencer par la pauvreté de l'univers culturel mobilisé par les programmes scolaires, la diminution du temps consacré aux savoirs de base (français, mathématiques) et la prolifération d'activités parasitaires (prévention de ceci et de cela...). Il faut oublier le "ludique" et restaurer "l'effort". Il faut renoncer au primat de la "communication" et revenir à celui de la "compréhension", donc à la culture, à la richesse culturelle des Humanités. Mais de cela la pédagogie se moque bien, toute engluée qu'elle est dans l'auto-glorification de son arrogante logomachie.

Michel Renard, 20 janvier 2006



PS - Trouvé ce message qui m'a beaucoup amusé :

"Lire l'appel de l'ICEMFreinet (lu sur le café pédago) pour se rendre compte que certains n'en ont pas fini avec leurs délires:
"Ce n'est pas l'école des banlieues qu'il faut changer ou améliorer, c'est un autre système éducatif qu'il faut construire et mettre en place, un système dont les objectifs ne seront plus les mêmes et qui ne s'appuiera plus sur les mêmes valeurs. Un système où des termes comme notation, évaluation, programme, diplômes n'auront plus de sens et où la réussite personnelle et la réussite collective auraient partie liée... Aujourd'hui, les mouvements pédagogiques et d'éducation populaire sont-ils capables de proposer et de défendre un système éducatif radicalement différent, pour porter cette école populaire et émancipatrice ? Si oui, il est temps de s'y mettre, ensemble !"
Personnellement j'aime beaucoup le "où la réussite personnelle et la réussite collective auraient partie liée..." il y a un petit côté rééducation dans les rizières.
Enfin, la notation est pourchassée, les évaluations sont bidonnées, les programmes vidés et les diplômes dévalués : je ne vois ce qu'ils veulent de plus. Je ne connais pas leur fournisseur mais il faudrait brancher Kate Moss sur le site Freinet."

Posté par Guillaume le 16 novembre 2005.

 

PS 2 - Intéressantes réponses de Jean-Paul Brighelli à l'occasion d'un "tchat" sur telerama.fr le 25 janvier 2006 : "il faut brûler les IUFM" d'où j'extrais ceci :051113225027.a07vgxij2_une_ecole_maternelle_de_carpentras_incendiee_dans_b

Frédéric (internaute) : De quels constats partez-vous pour dire que l’école ne joue plus son rôle d’ascenseur social ?
Jean-Paul Brighelli :
Des événements de novembre dernier. Si tant d’enfants ont spontanément brûlé tant d’écoles, c’est qu’ils avaient quelque chose à lui reprocher. Ce qu’ils avaient à lui reprocher, c’est de ne plus jouer son rôle, et même de ne plus jouer aucun rôle. L’école de ces quartiers est devenue une mauvaise garderie. Deuxième preuve par le haut : les grandes écoles ne recrutent pour ainsi dire plus qui que ce soit qui ne soit pas enfant de cadre sup. Alors que dans les années 1950 à 1970, la proportion d’enfants de paysans ou d’ouvriers, par exemple à l’Ecole normale supérieure, était d’environ 5 %.

 

PS3 - Échange de lettres entre Roger Monjo (Maître de conférences en sciences de l'éducation à l'université de Montpellier 3) et Jean-Paul Brighelli à l'occasion de la sortie par ce dernier de la Fabrique des crétins.
On peut notamment y lire ceci : "Tu n'ignores pas, forcément, que Meirieu lui-même a déclaré : «Il y a quinze ans, je pensais que les élèves défavorisés devaient apprendre à lire dans des modes d'emploi d'appareils électroménagers plutôt que dans les textes littéraires. Parce que j'estimais que c'était plus proche d'eux. Je me suis trompé. meirieu_1Pour deux raisons : d'abord, parce que les élèves avaient l'impression que c'était les mépriser ; ensuite, parce que je les privais d'une culture essentielle. C'est vrai qu'à l'époque, dans la mouvance de Bourdieu, dans celle du marxisme, j'ai vraiment cru à certaines expériences pédagogiques. Je le répète, je me suis trompé.» (18 janvier 2005)

Cet ancien membre des Jeunesses Ouvrières Chrétiennes, qui a mis ses quatre enfants dans l'enseignement privé, s'imagine-t-il qu'une confession vaut absolution ? Ces quatre ou cinq générations d'élèves sacrifiés sur l'autel de l'expérimentation constructiviste réclament justice. Et je serais tenté de faire un jour le procès de ces enseignants qui s'imaginent jouir de l'impunité : on inculpe bien un médecin qui, pour un prétexte idéologique, refuserait son aide à une parturiente - afin qu'elle accouche dans la douleur, conformément au Credo biblique..." (Jean-Paul Brighelli)

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renoncer au primat de la "communication"
et revenir à celui de la "compréhension"


15 mai 2006

le difficile et très long arrachement au monde de l'inculture (Pierre Nora)

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Le Dictionnaire de pédagogie de Ferdinand Buisson
a connu deux éditions : 1878-1885 et 1911



le difficile et très long arrachement

au monde de l'inculture

Pierre NORA

une troupe de petits sauvages effrontés et timides,

grossiers et rusés, réduits aux rudes

instincts de l'égoïsme...

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De cette figure du maître d'école, une historiographie de haute qualité, à commencer par le petit livre de Georges Duveau, a fini par populariser, au bout d'un quart de siècle, une vision riche et précise, admirative et pourtant légèrement condescendante pour ces "saints sans espérance". (...)


 

Ferdinand Buisson (1841-1932)


... cette image folklorique et sentimentale nous occulte une mémoire plus profonde, moins haute en couleurs mais plus riche de vérité anthropologique et culturelle, faite de durée lente, quotidienne, répétitive et disciplinaire, comme tous les gestes de l'éducation, à une époque où l'écriture n'était pas loin de s'apparenter à un travail manuel, où l'acquisition des pleins et des déliés supposait le dur apprentissage de la calligraphie, le difficile et très long arrachement au monde de l'inculture.

Mémoire des gestes et des habitudes, la moins spectaculaire, la plus corporelle et certainement la plus vraie. C'est à elle que nous renvoie toute une série d'articles parmi les plus significatifs de ce Dictionnaire, les plus inattendus aussi comme "Égoïsme", "Propreté", "Volonté" (éducation de la), qui concernent tous l'éducation morale et corporelle et la formation des mœurs, ou, par exemple, le long et remarquable développement sur la "Politesse", malheureusement disparu de l'édition de 1911, où le Dr Élie Pécaut s'attachait à démontrer sur trois colonnes que l'ancienne politesse française n'était pas simplement une "œuvre d'art aristocratique", et que l'école primaire devait _cole_jumellesdonc être, entre autres choses, une école de politesse, parce qu'elle est avant tout une école de civilisation.

"Ce n'est pas une tâche commode. Et quand il vous arrivera de voir un maître ou une maîtresse d'école rurale qui a reçu des mains de la nature une troupe de petits sauvages effrontés et timides, grossiers et rusés, réduits aux rudes instincts de l'égoïsme, et qui rend à la société de petits hommes bien élevés, formés à la vie compliquée et supérieure de notre peuple, sachant se tenir, parler, se taire, montrant de la dignité, du tact, peut-être du goût, si vous assistez à ce spectacle, ne marchandez pas votre admiration : c'est l'un des plus grands que vous puissiez voir". (*)

Pierre Nora, article "Le «Dictionnaire de pédagogie» de Ferdinand Buisson",
in Les lieux de mémoire, 1. La République, éd. Quarto-Gallimard, 1997, p. 343-345.


(*) Aujourd'hui, de tels propos ne vaudraient-ils pas une mise en examen pour atteinte aux droits de l'enfant ? Et pourtant... (MR)


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15 mai 2006

En finir avec les IUFM (Fabrice Barthélémy et Antoine Calagué)

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les IUFM : dogmatisme, jargon,
médiocrité, inutilité




En finir avec les IUFM

3 septembre 2002

Fabrice BARTHÉLÉMY et Antoine CALAGUÉ
professeurs agrégés d'histoire



Ce texte a été rédigé il y a quelques années. Mais il n'a, malheureusement, rien perdu de sa valeur. (MR)


Le pire est pour bientôt si l'on ne se décide pas à agir.
Depuis dix ans, la formation initiale des professeurs est dispensée dans des établissements dits "IUFM" (instituts universitaires de formation des maîtres). On pourrait résumer le bilan de cette expérience dans un consternant triptyque : l'IUFM est inefficace, inutile et parasitaire.

Inefficace : cette opinion est largement répandue dans le corps enseignant. Les IUFM entendent regrouper dans une même structure (les anciennes Ecoles normales d'instituteurs) tous les enseignants, de l'école primaire jusqu'au chargé de cours à la faculté, au mépris des spécificités de chaque niveau.
Le volume horaire consacré à la formation, pour ce qui concerne les professeurs du secondaire, n'a pouraccueil_chartres justification que de compléter le nombre d'heures imposé à un fonctionnaire stagiaire (qui n'effectue qu'environ 6 heures d'enseignement en établissement). Ces heures creuses du fonctionnaire sont, il faut bien le dire, remplies assez artificiellement par des enseignements assurés soit par des intervenants extérieurs peu concernés, soit par des professeurs souvent ravis d'échapper à un auditoire plus agité, après plusieurs années de bons et loyaux services. Le contenu est donc très pauvre. Les débats (peu animés) portent par exemple sur des questions aussi essentielles que la couleur du stylo utilisé pour la correction des copies ou - tous les stagiaires ont connu cela - la façon de faire son premier cours, cet enseignement étant dispensé! deux semaines après la rentrée des classes.

L'IUFM n'ouvre ses portes qu'en septembre, alors qu'il serait évidemment souhaitable de recevoir une formation dans les semaines précédant la rentrée. Ainsi, son flot jargonnant n'arrive à son plus haut débit que lorsque les jeunes professeurs sont déjà en situation de responsabilité.

La plupart des heures sont consacrées au "retour d'expérience", sorte de discussion à mi-chemin entre la séance de thérapie psychosociologique collective et les débats fréquemment pratiqués dans les débits de boissons. L'ennui est la caractéristique principale de ces réunions ; puisqu'il faut bien meubler, les pauses-café sont innombrables.

Quant aux cours de psychologie, sociologie et philosophie de l'éducation, ils n'ont qu'un rapport lointain avec les disciplines universitaires du même nom. Leur faillite est double : ils sont à la fois dépourvus de tout intérêt et de toute application pratique pour de jeunes professionnels au début de leur carrière, ce qui n'aurait guère d'importance s'ils n'étaient de plus très loin du niveau intellectuel qu'on serait en droit d'attendre d'un institut "universitaire". S'il est vrai que "les enfants changent à partir de 13 ans", que "le "13 heures" de TF1 est à regarder avec discernement" ou que Guernica est un tableau "éminemment politique", jbc2tout cela n'est pas vraiment nouveau. Prendre les jeunes professeurs, lauréats de concours difficiles au sortir d'une formation universitaire de qualité, pour des adolescents incapables d'entendre un discours adulte et d'écouter un cours digne de ce nom augure mal leur responsabilisation et la confiance qu'on place en eux. L'excellence indéniable de certains formateurs attachés à transmettre les clés et les enjeux de leurs disciplines est ainsi diluée dans une masse de médiocrité qui décourage les plus enthousiastes.

Inutile : jusque dans les années 1990, les futurs professeurs étaient contrôlés et suivis dans l'établissement où ils effectuaient leur stage, un professeur expérimenté les prenant en charge. C'était le système du tutorat, le stagiaire allant dans la classe du tuteur, et vice versa. La formation de proximité, par l'exemple, a aussi ses vertus. Cela pouvait sembler insuffisant, mais cela marchait. Or ces structures fonctionnent toujours, mais sont formellement sous l'autorité de l'IUFM. Dans la pratique, les liens avec l'IUFM sont faibles, et beaucoup de tuteurs disent le mal qu'ils en pensent. Toujours dans la pratique, c'est là, dans l'établissement et avec le tuteur, que les stagiaires trouvent les réponses à leurs problèmes immédiats. Le tuteur est au plus près, il peut aider au moment où se pose la difficulté, et selo! n les besoins du jeune professeur. L'équipe pédagogique et les personnels de l'établissement conseillent, aident, soutiennent le stagiaire concrètement.

Le tutorat est essentiel et efficace : pourtant il est dévalorisé par l'appétit des IUFM, qui doivent s'autojustifier en accaparant toujours plus l'emploi du temps des stagiaires, les soumettant à des exercices futiles et infantilisants.


Parasitaire : l'IUFM doit assurer son pouvoir. Il use de tous les moyens pour se développer et s'imposer. Il s'incruste dès la licence, en distribuant généreusement les bonifications à ceux qui suivront ses cours.arton974 Ensuite, il fait régner un régime de terreur sur ses stagiaires en punissant l'absentéisme et en brandissant, en tant qu'employeur, la sempiternelle menace de la retenue sur salaire.

Monde orwellien où les mots employés travestissent la réalité qu'ils sont censés décrire, l'IUFM assure en réalité la paix sociale en ses murs grâce à son pouvoir de sanction et de validation sur les jeunes professeurs. Ils ne sont plus évalués par le corps indépendant de l'inspection mais, dans leur grande majorité (professeurs certifiés), "visités" par leurs formateurs et astreints à rédiger un "mémoire professionnel" qu'ils soutiendront à la fin de l'année scolaire. Jugés en fin de compte davantage sur leur assiduité et leur capacité à reproduire dans cet écrit dérisoire le discours qui leur a été inculqué que sur leurs qualités effectives d'enseignant, face à leurs élèves, les stagiaires sont contraints au silence. Et l'IUFM peut poursuivre sereinement, malgré quelques éclats épars de colère froide, son entreprise accablante.

Finalement, les cours qui y sont dispensés sont souvent dogmatiques, jargonnants (qui n'a pas entendu parler du "triangle didactique" ?) et d'une exigence extrêmement faible. Quels professeurs voulons-nous ? Des gens formatés, capables de "meubler" professionnellement leurs cours, ou bien des individualités fortes et responsables, maîtrisant leurs disciplines et capables d'assumer leur mission ? L'IUFM n'est pas la réponse appropriée à la massification de l'enseignement, car il nivelle par le bas. L'exigence doit redevenir la règle. Ce ne sera possible qu'en dehors d'une institution viciée qui neutralise la bonne volonté et les compétences de nombreux formateurs, prisonniers de ce système sclérosant.

Ce n'était pas le chemin suivi par le ministère Lang, puisqu'il était question dans un avenir proche, sans débat ni discussion, de renforcer très sensiblement les prérogatives des IUFM et d'allonger la durée de formation, voire à terme de mettre en place une "filière IUFM" qui formerait de A à Z, et délivrerait un mastère (bac + 5). Le pire est pour bientôt si l'on ne se décide pas à agir.

L'IUFM est une institution structurellement inadaptée, dont l'enseignement est notoirement insuffisant, mais dotée d'un pouvoir de nuisance propre à imposer aux jeunes professeurs une docile conformité. L'ennui, la déresponsabilisation et la démotivation y sont distillés. Le tout coûte des sommes considérables et constitue le laboratoire d'un naufrage éducatif généralisé.

Ce texte, fruit de notre expérience, dégagé de toute préoccupation partisane ou syndicale, sera sans doute lu avec approbation par beaucoup de nos collègues et compagnons d'infortune, résignés ou décidés à éviter d'éventuelles représailles. Puisse-t-il surtout être lu et compris par nos nouveaux ministres et les décider à en finir avec les IUFM.barthelemy

Fabrice Barthélémy et Antoine Calagué,
professeurs agrégés d'histoire


                                                                                                                                                                                                                                        F. Barthélémy

- source de ce texte

 

15 mai 2006

J'appelle à un bilan des "maths modernes à l'école" (Marc Le Bris)

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avec des petits, il faut partir de choses concrètes,
de paquets de bonbons, de pommes, d'argent, il faut réhabiliter
l'arithmétique qui manipulait des objets, des quantités, des grandeurs et des unités





J'appelle à un bilan

des "maths modernes à l'école"


Marc LE BRIS

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Il s'est passé en calcul ce qui s'est passé en lecture...
les mêmes inversions de sens du travail, la même tentative de saut
direct à l'abstraction, les mêmes refus de la transmission orale,
la même négation de la mémoire, de l'apprentissage,
de la structuration, de l'apport culturel par l'adulte



Puisque, selon les modernes, l'enfant doit lui-même construire son savoir, il doit lui-même construire ses raisonnements. Reprenons des exemples simples. Comment un enfant va-t-il savoir, dans un problème à une seule opération, laquelle utiliser ? Pour nos modernes, il va tout simplement s'y entraîner seul. Et vérifier seul si c'est bon. Ce sont les fameuses "situations-problèmes autocorrectives". Mais grâce à l'intervention des mêmes modernes sur les programmes, il ne connaîtra les quatre opérations qu'en fin de CM1, année de l'apparition de la division dans la scolarité actuelle [vous le saviez, vous qui avez quitté l'école il y a longtemps, ou dont les enfants n'y sont pas encore...???!!?? - c'est de la régression généralisée !! MR]. Au CM2, il connaît enfin les quatre opérations, il peut travailler pendant un an à choisir laquelle est la bonne parmi les quatre.

Lorsqu'il est entré au CE2, il ne connaissait que l'addition - sauf obstination des instituteurs à faire, malgré tout, ce qui leur semble nécessaire. "À la fin du cycle 2 (CP-CE1), seule la technique opératoire de l'addition est exigible" (1). Les enfants modernes sont tellement imprégnés de l'addition seule qu'ils confondent longtemps le mot "opération" avec le mot "addition". À chaque question du maître sur ce qu'on doit faire pour trouver quelque chose, ils répondent "l'opération", puisqu'ils n'en connaissent qu'une. À force de tout remettre à demain, on ne peut plus rien faire.

Je voudrais seulement que les élèves aient assez vite les quatre opérations sous la main. Avant la fin du CP. Un partage simple par 2 ou 5, ritualisé dans la division verticale, est tout à fait envisageable, comme cela se faisait avant la circulaire des "maths modernes à l'école" de 1970, première vraie modification des programmes depuis 1887. Pour que ne s'installent pas les tactiques simplistes qui permettent de trouver à coup sûr un résultat exact parmi seulement deux opérateurs (résultat plus petit = soustraction). Maintenant, nous ne sommes pas bien avancés sur le "comment choisir la bonne opération".

J'ai quelquefois l'impression que les enfants modernes en sont réduits à utiliser simplement leur liberté de choix pour décider quelle opération va le mieux. On ne leur a jamais montré de type de raisonnement. On n'a pas défini les opérations par les types de services qu'elles peuvent rendre comme, par exemple, la1960_61_8eme2 division nombre de parts et la division valeur de la part – voir le vieux livre de CE1 évoqué plus haut (Ardiot, Warnauld, Budin, Calcul. Cours élémentaire, Hachette, 1960). Puisque les enfants ont déduit eux-mêmes à quoi elles servaient et comme on a uniquement favorisé leur tâtonnement expérimental, ils se débrouillent comme ils peuvent. La méthode la plus fréquente issue de ce tâtonnement expérimental est celle-ci : l'enfant applique les quatre opérateurs aux deux nombres du problème puis il compare les quatre résultats obtenus pour choisir celui qui "va le mieux", selon son bon sens ou son estimation naturelle : on retrouve les mêmes aberrations que pour la lecture. Cette façon de faire, à mes yeux très néfaste, n'est même pas combattue car elle est censée favoriser l'autonomie. Elle est considérée comme une méthode parmi d'autres.

Pour bien décrire jusqu'où tout cela mène, il faut parler ici de l'utilisation encouragée des calculettes dans les classes modernes, puisque la pratique manuscrite des opérations est stupide et lourde. Le problème est posé, l'élève tape sur la calculette les quatre calculs possibles en une demi-minute, puis il choisit le résultat qui lui plaît le mieux. Un de mes collègues appelle ça le "zapping mathématique". Nous en sommes là.

Toujours pour raison de "construction autonome des savoirs", les enfants n'abordent pas directement la soustraction, mais ce qu'on appelle l'addition à trou. Livrés à eux-mêmes, ils trouvent combien il manque de bonbons dans le paquet de 25 qui n'en contient plus que 17 en utilisant l'addition : 17 plus combien égale 25 ? Et il leur suffit de compter de 17 jusqu'à 25 en levant un doigt à chaque nombre pour arriver au résultat. C'est bien, c'est vrai, c'est une première approche de la soustraction comme l'inverse de l'addition. Mais voilà, les modernes prétendent que cette étape suffit, que l'enfant qui a compris l'addition à trou a compris le "sens" de la soustraction. (Cf. Une addition différente : la soustraction, film réalisé par l'équipe ERMEL-CNDP). C'est-à-dire qu'ils suppriment, comme d'habitude, ce que l'adulte apporte à l'enfant : la technique éprouvée de la soustraction, son algorithme général de résolution. L'enfant reste un autodidacte, il ne disposera donc pas de cet outil fondamental qu'est la soustraction. Il ne s'y frottera pas. À chaque "situation soustractive", il refera la raisonnement d'inverser l'addition. La soustraction ne fera pas partie de culture.

J'appelle à un bilan des "maths modernes à l'école". Comme pour la lecture globale, il y a eu un apparent retour en arrière. On a enlevé les éléments les plus outrageusement impossibles, on a enlevé les bases exotiques, les ensembles, mais on a gardé l'abstraction des nombres, la défiance contre le calcul mental, le rejet de l'arithmétique, la volonté de retarder les techniques opératoires dans les programmes, la domination exclusive des tableaux de proportionnalité, sans qu'aucun bilan véritable en soit jamais tiré.

Je ne dis pas que les "mathématiques modernes", celles de Bourbaki, sont ou seraient mauvaises ou inutiles. Elles sont peut-être bien précieuses aux grands mathématiciens. Je dis seulement que ce qu'on a appelé les "maths modernes à l'école" était une folie. Je dis seulement qu'avec des petits, il faut partir de choses concrètes, de paquets de bonbons, de pommes, d'argent, et que dans ce but il faut réhabiliter l'arithmétique qui manipulait des objets, des quantités, des grandeurs et des unités. On a perdu dans ce domaine une foule de savoir-faire qu'il va bien falloir reconstruire.

On s'entraîne aux raisonnements en les effectuant suffisamment souvent pour les transformer en outils. Je pense qu'ils se retiennent et se mémorisent, et qu'une sorte de typologie des raisonnements s'installe quand on les a suffisamment pratiqués par des procédés neurologiques complexes que nous ne connaissons pas. Ce disant, je subordonne un peu l'intelligence à la mémoire et le travail de la mémoire est particulièrement renié par l'école contemporaine ; ou plutôt, je réduis l'intelligence à la qualité de l'organisation de la mémoire. En fait, j'avance que les mémorisations nombreuses sont nécessaires à la construction de l'intelligence. Il n'y a jamais eu de qualité dans l'organisation de peu de choses. Pour qu'il y ait qualité, il faut la quantité. Je dis qu'il faut faire beaucoup de problèmes, similaires et différents.

L'enseignant apporte alors des "modèles" de raisonnement, éprouvés par des siècles de réflexion, à l'enfant qui, lui, apprend à s'en servir avant d'inventer les siens. Il aura à reconnaître, dans un énoncé, le modèle de raisonnement qui s'applique. Et ce ne sera jamais mécanique ; une fois le modèle bien installé, arrivent les exceptions, les variantes, les subtilités. Après, pas avant. La règle avant les exceptions. Pas tout en vrac, comme les modernes le pratiquent dans toutes les activités d'enseignement.

Il s'est passé en calcul ce qui s'est passé en lecture. Les points communs sont nombreux. Ce sont les mêmes inversions de sens du travail, la même tentative de saut direct à l'abstraction, les mêmes refus de la transmission orale, la même négation de la mémoire, de l'apprentissage, de la structuration, de l'apport culturel par l'adulte. La même négation de la réalité de l'enfance. Le même recul politique apparent de la théorie, pour mieux se perpétuer et continuer à dominer sous d'autres noms. Les "maths modernes à l'école" sont la méthode globale appliquée au calcul, et la méthode globale ressemble bien à une sorte de "maths modernes" pour la lecture. Alors, ce n'est pas tant la méthode globale seulement ou les "maths modernes à l'école" toutes seules qui ont détruit l'école mais bel et bien un plan d'ensemble, lancé depuis les années 1970 sur la lecture et le calcul ; c'est une théorie unique et générale de la pédagogie, une théorie d'ensemble.

Marc Le Bris, Et vos enfants ne sauront pas lire... ni compter !
La faillite obstinée de l'école française
, Stock, 2004, p. 9699.



(1) Documents d'application des programmes ; mathématique, cycle 2, appliqués à la rentrée 2002, CNDP.

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- le livre de Marc Le Bris, Et vos enfants ne sauront pas lire ni compter !


- le site de Michel Delord, professeur de mathématiques, membre du GRIP


14 mai 2006

Groupe de Réflexion Interdisciplinaire sur les Programmes (G.R.I.P.)

16159
pour un enseignement rénové et de qualité





Groupe de Réflexion Interdisciplinaire

sur les Programmes (GRIP)



des dégradations, des lacunes et des incohérences profondes
dans les enseignements fondamentaux ou dans
les méthodes pédagogiques imposées



Dans la perspective du grand débat sur l'Ecole envisagé par le Gouvernement, des enseignants de toutes disciplines et de tous niveaux ont été amenés en juin 2003 à constituer un "Groupe de Réflexion Interdisciplinaire sur les Programmes". Le 5 juillet 2005, le GRIP s'est constitué en association loi 1901.

Depuis sa création en juin 2003, le travail du groupe a consisté à analyser les évolutions de l'enseignement dans notre pays, dans un cadre situé à dessein hors des corporatismes et des idéologies politiques. L'objectif du GRIP est d'aboutir à des propositions concrètes pour remédier aux graves difficultés actuelles, dans le souci de reconstruire un système éducatif de qualité, mettant en avant le savoir, le travail et le mérite.

Notre préoccupation la plus grande est que les instances officielles chargées d'évaluer l'école depuis une vingtaine d'années n'ont pas été en mesure d'établir des diagnostics pertinents, peut-être faute d'analyses et de messages suffisamment clairs en provenance des experts et du milieu enseignant, mais peut-être aussi en raison de conditions politiques ou d'injonctions administratives interférant avec l'objectivité indispensable.

Une analyse des programmes actuels et des exigences scolaires du moment révèle en fait des dégradations, des lacunes et des incohérences profondes dans les enseignements fondamentaux ou dans les méthodes pédagogiques imposées. Sont particulièrement touchés le calcul, la lecture, l'orthographe, le raisonnement, la démarche déductive, la capacité d'analyse et de synthèse et, en sciences, le lien entre expérimentation et modélisation mathématique. Au niveau du Collège et du Lycée, la diversification des filières et l'adaptabilité du système éducatif aux différents profils scolaires possibles ne sont pas en phase avec les besoins. La seule issue raisonnable est donc une reconstruction de pans entiers du système éducatif de notre pays.

Nous considérons de notre devoir d'alerter les services de l'état, les commissions de programme, les syndicats enseignants et les grands media. En même temps, nous cherchons à proposer des solutions concrètes pour mener à bien les réformes urgentes qu'il conviendrait de mettre en oeuvre.

Un rapport préliminaire a été adressé aux experts du Ministère et à la Représentation Nationale fin Septembre 2003. Nous souhaitons poursuivre la réflexion aussi longtemps que nécessaire, élaborer des trames de programmes et de filières pour un enseignement rénové et de qualité, pouvant aboutir par exemple à la mise en place de filières et d'établissements-pilote, ou à un déploiement plus général au niveau national.

Bureau du GRIP

 

Président : Jean-Pierre Demailly
Vice-président : Michel Delord
Secrétaire : Isabelle Voltaire
Secrétaire-adjoint : Guy Morel
Trésorier : Gilbert Sibieude
Trésorier-adjoint : Gilbert Castellanet

 

Statuts du GRIP
Le GRIP dirige depuis septembre 2005 un réseau de classes primaires expérimentales (projet SLECC: "Savoir Lire Ecrire Compter Calculer" : mise en place du projet, texte fondateur de janvier 2004). Ses réflexions l'amènent à publier des rapports, des livres, des manuels et des documents de cours. Des sessions de formation à l'intention des enseignants ont été (et seront) organisées. Toutes ces activités nécessitent évidemment des moyens financiers non négligeables.

site du GRIP


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- site du Groupe de réflexion interdisciplinaire sur les programmes (GRIP)

les responsables du G.R.I.P.


Jean-Pierre Demaillybild_3
Ancien élève de l'Ecole normale supérieure (rue d'Ulm), membre de l'Académie des sciences, professeur à l'Université Joseph Fourier de Grenoble, professeur à l'Institut universitaire de France, Jean-Pierre Demailly est un chercheur reconnu comme l'attestent les nombreuses distinctions scientifiques qui lui furent décernées (médaille du CNRS, prix Rivoire, prix Peccot-Vimont du Collège de France, prix Pierre Carrière de l'Académie des sciences, prix scientifique IBM pour les mathématiques et grand prix de l'Académie des sciences).


Michel Delordmd11
Professeur de mathématiques, animateur d'un site très fourni sur les thèmes de la défense de l'école, membre du Conseil d'administration de la S.M.F. (Société mathématique de France).




Isabelle Voltaire

P
rofesseur de mathématiques, membre de l'association des professeurs de mathématique de l'enseignement public en France (APMEP) et de l'association "Reconstruire l'école".


Guy Morel2841144623.08.lzzzzzzz12841144801.08.lzzzzzzz
Professeur de Lettres dans un lycée au Mans. Auteur de L'horreur pédagogique (avec Daniel Tual-Loizeau, éd. Ramsay, 1999)  et de Petit vocabulaire de la déroute scolaire (avec Daniel Tual-Loizeau, éd. Ramsay, 2000).




2755400358.01.lzzzzzzz

Gilbert Sibieude
Président de l'association "Lire et écrire". Auteur de Apprendre à lire à la maison (avec Gilbert Castellanet, préface de Jacqueline de Romilly, éd. François-Xavier de Guibert, 2005). Co-fondateur avec Gilbert Castellanet de l'association Famille-éducation-école.net.



Gilbert Castellanet
Polytechnicien. Auteur de Apprendre à lire à la maison (avec Gilbert Sibieude, préface de Jacqueline de Romilly, éd. François-Xavier de Guibert, 2005). Co-fondateur avec Gilbert Sibieude de l'association Famille-éducation-école.net.





14 mai 2006

Comment être stagiaire de lettres à l'IUFM

16153_tn
École Normale d'Instituteurs, promotion 1908-1911







Comment être stagiaire de lettre

à l'IUFM




L'avenir de l'étudiant en Lettres étant désormais tout tracé (papa en a marre de payer le loyer de2020007096.08.lzzzzzzz l'appartement), le jeune Licencié a décidé de passer son CAPES. Ayant obtenu le concours, il brandit le précieux certificat, ce sésame qui lui ouvre les portes de l'Enseignement, en pensant qu'il va pouvoir dispenser son savoir. Grosse erreur : il faut maintenant valider la formation théorique, montrer qu'on est un pro du terrain.

Afin d'aider nos jeunes collègues, voici quelques instructions qui pourront leur rendre service et leur permettront d'être certifiés conformes. Ce mode d'emploi a été élaboré à partir d'expériences et de témoignages authentiques ; il se situe donc parfaitement dans la lignée de cette noble institution qu'est l'IUFM. Si vous suivez les quelques conseils prodigués ci-dessous, nul doute que vous obtiendrez l'Appellation d'Origine Contrôlée.2070302458.01.lzzzzzzz Nous pouvons même gager que cette traçabilité permettra de gérer pour longtemps la chaîne d'approvisionnement. Il n'y a point à balancer, il faut tout donner.



1 - Pour trouver l'IUFM.

1) Chercher l'adresse de l'IUFM sur le net. En profiter pour consulter le site de l'IUFM et s'apercevoir qu'il n'y a presque rien sinon des organigrammes et des intitulés de stage. Lire les intitulés de stage et s'interroger en même temps que le Spécialiste : “Comment combattre l'ilettrisme ?” (sic) Se rassurer : il existe des “ pratiques innovantes ”.

2) Prendre sa voiture et partir à l'I.U.F.M. Se perdre un peu dans la ville car ce n'est pas là que vous avez 2070380513.08.lzzzzzzzétudié. Ah ben oui, Monsieur, on ne choisit pas son affectation.

3) Se dire que l'on est sans doute sur la bonne voie quand toutes les automobiles Renault qui vous précédent ont un autocollant MAIF sur le pare-brise arrière. Se dire que d'ailleurs on en changerait bien d'automobile. (On apprendra par la suite que la CASDEN est présente à l'IUFM et que la charmante jeune fille qui tient le stand est disposée à vous accorder un prêt à des conditions exceptionnelles : elle est pas belle la vie ?)

4) Arriver à l'IUFM. Chercher une place pour se garer. Apercevoir une vieille pancarte rouillée dans un coin : “Ecole Normale”. Contempler les belles enluminures qui dorent le blason de 2253005436.08.lzzzzzzzl'Institut.

5) Retrouver quelques copains de fac. Interroger les copains : “Et toi t'es où ?”. Comparer mentalement le classement au concours et l'affectation obtenue. Se dire que les premiers, décidément, seront les derniers.



2 - Pour la formation disciplinaire.

1) Ecouter le formateur (c'est le monsieur qui fume la pipe pendant la pause en parlant de sa jeunesse sartrienne) et la formatrice (c'est la dame très bien décorée qui ne fume pas et qui, elle, n'aime pas2253160687.08.lzzzzzzz Sartre).

2) Entendre les quelques “trucs et ficelles” pour les premières heures de cours. Se dire que c'est bizarre d'avoir ces conseils après les premières heures de cours devant les élèves. Regarder vos condisciples s'effondrer parce qu'ils n'ont pas fait comme ça. Entamer la thérapie de groupe. Ecouter chacun raconter sa petite anecdote : les réveils réglés cinq heures à l'avance, les holala c'est grand comme bahut et on m'a prise pour une élève. Compatir.

3) Ne JAMAIS parler de littérature (sujet tabou).2070308790.01.lzzzzzzz

4) Repérer une jeune femme hystérique qui veut venir en aide aux jeunes car c'est notre mission et noter toutes ses interventions pour faire rigoler votre copine à la maison. La regarder opiner du chef devant le discours (mot à surligner, très important) du formateur. Trouver qu'elle ressemble aux petits chiens mécaniques à l'arrière des voitures. Se rappeler à ce propos d'aller voir la nana de la CASDEN.

5) Comprendre ce qu'est une séquence. Comprendre que c'est l'Unique, la Vraie, la Nouvelle manière de travailler. Décloisonner. Décloisonner. Décloisonner.

6) Inventer une séquence. Dire n'importe quoi pourvu que l'élève soit mis en activité. Valoriser l'oral. Ne balzacpas se soucier de l'exactitude des connaissances. Entendre le formateur parler d'une2070364682.01.lzzzzzzz approche citoyenne du texte. Souffrir en silence quand la petite chienne hystérique affirme que Balzac, c'est de la littérature à papa et que les jeunes ça ne les intéresse pas. Regarder sa bouche se tordre d'ignorance. Pleurer un peu le soir. Faire étudier Une Ténébreuse Affaire en cachette .

7) Débiner les collègues plus âgés qu'on a dans son établissement et qui eux eh ben y travaillent même pas en séquences. Sourire d'un air entendu. Se dire qu'on est plus fort et qu'ils disparaîtront bientôt vu qu'ils ne résisteront pas au nouveau public.

2070372022.01.lzzzzzzz8) Considérer que la majorité présente a toujours raison. Ne pas se compliquer la vie, ne pas citer de texte, ne pas débattre mais stigmatiser. Demander invariablement au réactionnaire de service “Et les élèves dans tout ça ?” d'un ton réprobateur. Froncer les sourcils tous ensemble puis faire une moue ironique en regardant le réac de biais.

9) Apprendre le nouveau vocabulaire tellement mieux. Interroger la pertinence des textes officiels. Attendre la réponse. Comprendre que c'est mieux parce que c'est comme ça et que vous êtes fonctionnaire.
2708008811.01.lzzzzzzz
10) Faire semblant de lire les IO parce qu'on va faire une synthèse au rétroprojecteur ! Pendant ce temps corriger les copies de vos élèves de quatrième. Se dire qu'il est urgent de leur réapprendre à conjuguer un verbe. Se dire que la progression à thème dérivé, finalement ça ne sera pas pour tout de suite.

11) A propos des progressions thématiques, se rendre compte que la formatrice en parle mais qu'elle n'a jamais lu une seule ligne de Combettes.

12) Commencer à rigoler parce que vous ne pouvez plus vous retenir. Apprendre que le rire est une2070423581.08.lzzzzzzz stratégie d'évitement et que vous ne voulez sans doute pas vous avouer quelque chose. Recommencer à rire. Expliquer ce qu'il y a de comique. Entendre parler de validation. Arrêter de rigoler.

13) Recevoir un coup de fil des formateurs afin d'éviter tout malentendu. Ecouter leurs aveux qu'on ne peut pas faire à tout le monde.


3 - Pour la formation commune.

1) Chaque matin se laver les dents avec du dentifrice didactique pour avoir une haleine pédagogiquementcolette_portrait_250 correcte. Faire des exercices devant sa glace pour n'articuler qu'une seule et unique phrase : “l'élève au centre”.

2) Ne pas s'étonner qu'un éminent pédagogue vous donne des scénarii pédagogiques destinés à maintenir l'attention des élèves et développer l'appétence des savoirs sans parvenir à intéresser son propre auditoire.

3) Aller voir la direction de l'IUFM pour signifier votre refus de faire de la gym dans le cadre du “ Potentiel psycho-récepteur de l'enseignant ”. Entendre encore parler de validation. Aller voir votre médecin.
na13_baudelaire
4) Chercher des titres de “mémoire professionnel” et de “rapports de pratique pédagogique”. En vérifier l'efficacité auprès de vos amis qui ne sont pas enseignants : s'ils sentent que cela parle d'école mais qu'ils ne parviennent pas à identifier le sujet exact, c'est que votre titre est bon. Astuce pour rédiger son mémoire : dans Word, utiliser la commande “remplacer” du menu édition pour substituer au terme “élève” l'expression “apprenant en phase d'autonomisation”. Appliquer le même procédé pour tous les mots clés (ex : “connaissances” se transformera en “capacités cognitives réparties selon les modalités d'évaluation : savoirs, savoir-faire, savoir-être”), vous économiserez un temps précieux. Attention cependant aux accords sujet-verbe.

5) S'inscrire à divers ateliers : poterie, verroterie, vidéo. Bien savoir qu'on peut être amené à tout enseigner, que c'est le Progrès et qu'on innove.

6) Passer deux jours sur l'orientation des élèves. Prendre son mal en patience devant le descriptif de chaque filière. Ne pas s'endormir. Ne pas craquer. Se souvenir de tous ces petits jeux inventés à l'école (morpion, bataille navale). En inventer de plus complexes, faire des études lexicométriques (fréquence des termes “jeune” et “autonomie” par exemple).

7) Se former aux NTIC. Bien comprendre que c'est l'avenir. Apprendre donc à utiliser word alors que vous savez programmer un site. Faire un petit film avec la caméra qu'on vous a prêtée. Se demander quel est le rapport avec l'enseignement de la grammaire et de la littérature.

4 - Pour quitter définitivement l'I.U.F.M.
Relever la tête.


texte de l'association 2070302393.01.lzzzzzzzSAUVER LES LETTRES








- source seconde : le-sages.org

- les lectures des Normaliens, un sondage : la promotion 1928-1931


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